Dossier Anton Parks n°3-3 : Archéologie, Art & Histoire, Mythes & Légendes « hors contexte »
Debunk Express des interprétations iconographiques d’Anton Parks
Article mis en ligne le 19 mars 2021

par Anpon Tarks

Lien vers l’article précédent : Dossier Anton Parks n°3-2 : La Vérité sur nos Origines


Nous allons rapidement analyser une série d’illustrations utilisées par Anton Parks dans divers ouvrages afin de justifier ses hypothèses, soit la soumission de l’humanité à des Aliens-lézards appelés Gina’abul par l’auteur. Nous verrons que les connaissances de M. Parks en Histoire, histoire de l’Art, en archéologie et en mythologie n’ont d’égales que celles qu’il possède en linguistique.

En gras : les descriptions des illustrations issues des ouvrages d’Anton Parks, suivies des illustrations reproduites en couleur, de meilleure qualité et non tronquées.

Nous nous contenterons d’analyser les illustrations de ses deux premiers tomes étant donné que le processus suivi par l’auteur est constamment le même et que les mêmes éléments fantastiques sont répétés jusqu’à l’écœurement.

Attention : nous tenons à préciser que même si nous qualifions à longueur de dossier les Chroniques du Girku d’œuvre littéraire et de roman, Anton Parks se défend d’écrire de la science-fiction et présente bien ses Chroniques comme l’histoire véritable de notre passé et ses essais comme des recherches « scientifiques » démontrant la véracité de ses visions.

Nous sommes Anpon Tarks, « les extrémistes de la Vérité vraie » (dixit Anton Parks, le 14 mai 2020 sur NuréaTV).


L’humanité enchaînée - littéralement étranglée - par des reptiles, selon le codex Laud, planche 34. Culture mixtèque [1].

L’auteur des Chroniques du Girku attaque fort avec cette représentation du Codex Laud. Ce Codex est regroupé dans ce que l’on nomme le groupe Borgia, une classification de Codex mésoaméricains présentant des similarités de style ou de contenu. Son origine mixtèque est discutée par certains chercheurs qui le considèrent plus probablement mazatèque - les zones mixtèque et mazatèque étant voisines, autour de l’Etat actuel de Oaxaca. De même, il n’y a pas de consensus quant à sa date d’élaboration. George Kubler par exemple (The art and architecture of ancient Mexico murals) le considère antérieur à 1350, mais la majorité des chercheurs le considèrent comme tardif, peint à la fin du XVe ou même au début du XVIe siècle. S’il y avait eu des Gina’abul à cette époque historiquement proche, nous en aurions des traces plus évidentes…
Cela reste un Codex typique de la Mésoamérique, c’est-à-dire un livre plié en accordéon réalisé sur du cuir animal, composé de 24 feuillets. La représentation, sortie de son contexte par Anton Parks, fait partie de la planche suivante :

L’ensemble du Codex est un calendrier rituel (un tonalpohualli, similaire au calendrier aztèque) qui indique les jours des cycles vénusien et solaire (de 260 jours, déjà cher aux Mayas). Chaque jour est accompagné de son glyphe, de la divinité sous l’égide de laquelle il est placé, et de scènes ou d’objets rituels avec lesquels il se trouve associé. [2]

Si l’omniprésence des Gina’abul et la soumission de l’humanité à cette engeance alien était si préoccupante pour nos ancêtres, pourquoi cette scène d’une « humanité enchainée par des reptiles » n’occuperait-elle qu’une place aussi infime au sein d’un Codex complet de 260 cases ? Pourquoi Parks ignore-t-il toutes les autres scènes qui, en revanche, ne contiennent aucun lézard ou serpent ?

Motif gnostique représentant le grand archonte clairement assimilé au dieu de la Bible Yahvé (IAW). Nous savons aujourd’hui que de multiples aspects de la culture hébraïque tirent leurs origines de l’Egypte ancienne et de Mésopotamie. Il n’est donc pas étonnant de retrouver la racine du terme Yahvé dans l’égyptien law (adoration, prière)... Cette apparence serpentine se retrouve aussi en Grèce, sur les statues des Titans dont les jambes finissent très souvent sous un aspect anguiforme afin de marquer, d’une manière détournée, la filiation reptilienne des surhommes de l’antiquité. Ce phénomène apparaît également sur certains sceaux cylindriques où figurent les dieux mésopotamiens. [3]

Anton Parks choisit une fois de plus les figurations qui l’arrangent.

Ce symbole (repris d’une amulette) ne représente pas Yahvé mais Abraxas, mot symbolisant les 365 émanations du Dieu Suprême pour la secte gnostique des Basilidiens (selon saint Jérôme, il serait également Mithra, dieu solaire des Perses). [4] Les lettres IAW parfois associée à Abraxas (mais pas toujours) désignent la divinité.

L’apparence serpentine de certains personnages mythiques ou légendaires (rare comme nous l’avons signalé à la fin de ce dossier : Dossier Anton Parks n°2-2 : Inspirations artistiques) doit se comprendre d’un point de vue symbolique.

Ici les jambes en forme de serpents indiquent le pouvoir du dieu sur le monde souterrain, quant à sa tête de coq, cela signifie qu’il règne également sur le monde dominé par le Soleil.

Dans le monde antique le serpent a toujours été le symbole du monde inférieur et le coq un symbole solaire. Le bouclier et le fouet portés par Abraxas en font un dieu à la fois protecteur mais aussi punisseur. Quant à la description par Parks des jambes anguiformes des Titans de la mythologie grecque, il s’agit là d’une grossière erreur. Ce sont les Géants, et non les Titans, qui avaient des jambes serpentines ; elles traduisent l’origine chtonienne des créatures mythologiques issues du sang d’Ouranos émasculé par son fils Cronos. Une simple recherche sur Wikipedia suffit à contredire Anton Parks… [5]

Relief tiré d"une grotte se trouvant sur le site archéologique de Chalcatzingo, dans l’état de Morelos, au Sud de la ville de Mexico. On y voit un "dieu" ou un haut dignitaire aztèque à l’intérieur de la coupe d’un vaisseau ovoïde qui crache le feu. Il est important de noter la présence du double G dans les mains du pilote et sur son siège. Ce symbole typiquement amérindien évoque la Voie Lactée ou la galaxie. Il est ici pour exprimer le fait que l’appareil peut voyager d’un bout à l’autre de notre univers. Notons aussi les fulgurations frontales qui font terriblement penser à la technique MHD qui consiste à aspirer l’air frontal d’un appareil volant et à l’éjecter à l’arrière de façon à donner au vaisseau une propulsion hypersonique. Les archéologues ne voient sur ce relief qu’un culte à la pluie ainsi qu’une gueule de jaguar symbolisant la terre. [6]

Une fois encore une simple recherche Wikipedia donne une explication simple et rationnelle à ce pétroglyphe de style olmèque : « Il relève clairement d’une thématique de la pluie et de la fertilité. Le Monument 1 est connu sous le nom de El Rey. Il représente un personnage tenant une barre cérémonielle, assis à l’intérieur d’un motif quadrilobé, image d’une grotte stylisée, d’où s’échappent de volutes qui représentent sans doute le vent ou de la vapeur. La scène est surmontée de motifs ondulés en U renversé au-dessus d’une rangée de barres que l’on interprète comme des nuages déversant de la pluie. Tout autour on trouve des motifs barre-point qui évoquent des gouttes d’eau ainsi que des motifs en cercles concentriques qui évoquent l’« eau précieuse », le jade. Des motifs point-barre se retrouvent sur le personnage lui-même. La scène suggère le pouvoir fécondateur du personnage, dont le sexe ne fait pas l’unanimité : si « El Rey » (« le roi » en espagnol) suggère un personnage masculin, certains auteurs penchent plutôt vers un personnage féminin. »

Nous sommes donc face à une symbolique de fertilité. Pas à un pilote de vaisseau spatial…(sic !)

Pour rester en Mésoamérique, plus loin à la page 127 de son tome 1 des Chroniques, Anton Parks évoque la stèle du roi Pakal à Palenque et y voit, comme son maître à penser Erich Von Däniken, un pilote dans un vaisseau spatial (quelle obsession !).
Pour un déboulonnage en règle de cette fumisterie, nous vous invitons à dévorer ce papier de Laurent Tlacuilo publié chez Irna : Pakal planqué à Palenque.

Détail de la planche 70 du codex mixtèque Borgia. Le même type de scène se trouve sur la planche 58 du codex Vaticanus B. Aucun élément ethnologique ou archéologique n’a pu encore rigoureusement démontrer que les Amérindiens pratiquaient l’anthropophagie. Pour exemple concret, nous pouvons rappeler les milliers d’Indiens emprisonnés et entassés dans les prisons lors de la conquête espagnole : ils moururent tous de faim !! La scène ci-contre ne peut donc illustrer que l’extraction d’un humanoïde immergé dans une matrice artificielle. [7]

Toujours obsédé par cette idée de matrice artificielle pour faire naître les hommes par génie génétique alien, Parks découpe, arrange et mutile les illustrations pour les faire coller à cette idée.

Ici nous avons deux dieux qui président une cérémonie punitive (sacrificielle ?). Celui de gauche semble en charge des opérations quand celui de droite semble apprécier particulièrement la scène se déroulant sous ses yeux.

L’officiant punit un pauvre malheureux dont la douleur traverse les siècles pour parvenir jusqu’à nous. L’opérant, au contraire de tirer (avez-vous déjà vu quelqu’un tirer avec un bâton dans cette position ?), semble plutôt appuyer de tout son poids sur la victime. Comment savons-nous que ce n’est pas un enfant ou un homme en cours de création dans une matrice artificielle ? Deux indices qui auraient dû sauter aux yeux de Parks : la coupe de cheveux de la victime (typique des habitants de la région à l’époque) ainsi que sa boucle d’oreille ! Difficile d’imaginer que les généticiens Gina’abul eurent la possibilité de créer en matrice artificielle les coupes de cheveux et les accessoires de mode à la demande ! [8]

Quant à la notion d’anthropophagie, Anton Parks est en pleine déroute... Le cannibalisme est représenté dans les Codex, il est rapporté par le moindre chroniqueur espagnol ayant pris part à la Conquête du Mexique, documenté par l’intermédiaire d’Indiens de façon extrêmement précise dans les travaux de Sahagun par exemple. Des scènes de sacrifices et de cannibalisme sont représentées sur des bas reliefs mayas ou teotihuacans, des charniers ont été mis à jour à Mexico (notamment un râtelier où reposent des milliers de crânes), etc. Chez les Aztèques par exemple, il est rapporté que la partie gauche du corps est considérée comme noble (probablement à cause du cœur), et que c’est l’empereur (le « tlatoani ») qui, lors de sacrifices, y avait droit en priorité. [9]

Initiation d’un homme par une prêtresse « Etoile Sombre » selon le codex Borgia, planche 57. La notion d’Etoile Sombre est exprimée par deux fois sur cette figure : une première fois en haut où l’on voit clairement un astre et son côté obscur et une deuxième fois dans chaque main de la prêtresse où apparaissent une étoile et un jaguar (symbole de la nuit). Notez les symboles lunaires sur la prêtresse qui évoquent le fluide menstruel. Entre les deux personnages se trouvent deux serpents qui schématisent Ida et Pingalâ, les deux courants subtils de la Kundalinî qui permettent de faire monter l’énergie le long de la colonne vertébrale. Comme le montre le dessin, l’ascension de ces courants subtils offre la possibilité d’atteindre le monde des étoiles et le mouvement opposé (descendant) apporte une « petite mort » figurée par le crâne placé dans le pot où la coupe qui symbolise le premier chakra et dont la signification est donnée en note 84.(page 325) [10]

Anton Parks évoque l’initiation d’un homme par une prêtresse mais les attributs des deux individus de la planche 57 du Codex Borgia sont clairs : il s’agit de deux divinités aztèques. Nous trouvons à gauche Tlazolteotl (déesse de la Terre, du sexe et des accouchements) et à droite Patecatl (dieu de la fertilité, de la guérison et de la lune), son consort. Les deux sont les seigneurs du Nord, assis sous un disque mi-lune mi-soleil représentant le passage du jour à la nuit.

Si Anton Parks s’était penché un peu sur la question, il aurait appris qu’exprimant un système de croyances chargé de représentations abstraites (divinités, symboles, numéros, couleurs, qui se combinent et se reflètent les uns sur les autres), le temps « mexicain » ne se distinguait pas radicalement de l’espace conçu comme un milieu hétérogène et doué de propriétés singulières selon les orientations cardinales. [11] Les points cardinaux jouaient un rôle fondamental dans les conceptions cosmologiques des anciens Mexicains. À l’image du Soleil qui monte dans le ciel, atteint son apogée, avant de redescendre pour disparaître, ils fournissaient la représentation et les lieux de tout ce qui sur terre croît et décroît (végétation, vie humaine, astres, etc.). [12]

Le monde mésoaméricain (au sens de « tout », de cosmos) est binaire et cyclique tout à la fois : les opposés se répondent et se rejoignent. Un élément symbolique n’existe pas sans son opposé, de la même façon que le temps est voué à se répéter. Cette sorte d’équilibre mystique se retrouve dans les représentations, de l’architecture aux Codex. Ainsi, entre autres, un élément en hauteur (sur une pyramide par exemple) trouvera régulièrement un renvoi en contrebas, ou à l’intérieur de celle-ci ; de même, l’espace est constitué de cinq points cardinaux, les quatre axes toujours associés à un centre, et orientés selon un axe est-ouest solaire (le nord magnétique étant ignoré des peuples précolombiens).

La symbolique de cette représentation tourne autour du concept du pulque, une boisson alcoolisée d’origine mésoaméricaine. [13] Tlazolteotl et Patecatl président tous deux à la fabrication de la boisson. Avant d’être bu, le pulque était offert au feu et aux points cardinaux. Selon l’anthropologue allemand Eduard Seler, le symbole aztèque cuitlatl à gauche de Patecatl symbolise le feu (ou la flamme), faisant allusion à l’effet que donne le pulque à celui qui le consomme. [14]

En somme, nous serions face à la « création divine » du breuvage alcoolisé favori des Aztèques. [15]

Le côté New-age de l’idéologie parksienne ressort clairement de cette interprétation lorsque l’auteur parle de chakra, d’énergie (?) et autre Kundalini. Interprétation évidemment simpliste au regard de la complexité de la pensée cosmico-religieuse mésoaméricaine !

Enfin Anton Parks évoque le lien entre les cycles menstruels et la lune. Une croyance populaire qui n’a aucun fondement comme les derniers résultats de l’application Clue app le confirment encore récemment. [16]

Figure provenant du texte funéraire égyptien de l’Amduat, dans la tombe de Thutmosis III (18ème dynastie), 6ème heure, registre 1, scène 5. Une prêtresse dénommée "l’Adoratrice de Dieu" veille sur trois matrices artificielles dans lesquelles s’assemblent des corps assimilés à des "images". Sur la partie supérieure de chacune des matrices apparaît un ovule fécondé par un spermatozoïde. Le texte précise : "La chair jubile et se réjouit. La tête parle après avoir rassemblé ses membres. Ce sont les images secrètes de la Duat." Ceux qui sont sur leur ventre [les reptiles] les protègent. "Quand Râ [la lumière] illumine leurs ténèbres, la tête parle après que l’Adoratrice de Dieu l’a appelé". [17]

L’interprétation d’Anton Parks est une fois de plus erronée mais cela vous étonne-t-il de le savoir tout aussi approximatif sur l’iconographie mythologique de l’ancienne Égypte que sur celle des autres cultures déjà évoquées ?

Le registre complet est illustré comme suit :

Une simple recherche rapide nous éloigne de la lubie de M. Parks quant aux matrices artificielles :

« Les divinités présentes ici vont pouvoir jouir de leurs offrandes funéraires et acquérir la puissance nécessaire à la protection d’Osiris contre ceux qui l’ont agressé et volé [6,1 15-17]. L’agression qui a causé la mort d’Osiris est assimilée à celle qu’a subie Horus/Rê (dans son combat contre Seth) dont l’œil a été arraché (par le « voleur » Seth [6,1 31] ).

Une scène aussi importante qu’intéressante figure à l’extrémité droite du registre. Trois tombeaux protégés par trois serpents crachant d’ardentes flammes recèlent trois morceaux de Rê dont la description évoque clairement la volonté d’assurer une synthèse divine. L’un [429] contient la tête de Rê, l’autre [427] contient l’élytre de Rê (donc du scarabée Khépri), le dernier [425] contient le postérieur de Rê. Les textes au symbolisme complexe et aux multiples allusions imbriquées évoquent le combat d’Horus contre Seth et l’œil divin meurtri, l’agression de Seth contre Osiris, et le corps dépecé de Rê/Khépri/Osiris. Mais ce qui est épars sera rassemblé [6,1 50], ce pourquoi la Chair jubile et se réjouit [6,1 49-50]. [18] »

Nous sommes donc loin de l’ovule, du spermatozoïde et de la matrice artificielle alimentée par courant électrique !
Tout s’explique clairement par les mythes de l’ancienne Égypte.
Et une fois encore Parks confond arbitrairement un dieu et un homme tout en sortant un morceau d’iconographie de son contexte et des textes liturgiques/religieux associés pour faire dire aux images tout… sauf la vérité.

Codex mexicain Fejervary-Mayer, planche 33. La grande déesse des eaux, incarnée en prêtresse-arbre, initie un être masculin qui se transforme lui-même progressivement en végétal. Vous noterez que la déesse porte les attributs du Serpent... [19]

L’interprétation admise se suffit à elle-même : la déesse de l’eau (Chalchiutlicue) verse de l’eau (colonne de gauche) sur une plante de maïs (personnage au milieu). Parks est toujours dans ses obsessions de voir des matrices artificielles et des initiations magiques partout. Notons la présence du chiffre 4 : 4 cercles, 4 lignes dans le sol… etc. Chiffre de stabilité et/ou terrestre nous orientant vers une symbolique agricole.

Codex mexicain de Borgia, planche 66. Un arbre de vie laisse s’échapper un flot de sang de son ouverture qui évoque un vagin. Les racines de l’arbre sont symbolisées par la tête d’un reptile, ceci exprime l’affiliation de l’arbre avec le serpent que l’on retrouve dans la Genèse. Face à l’arbre, un homme attend les yeux bandés. L’interdiction faite à l’homme de percer le secret de l’arbre de vie est ici manifeste ! [20]

Pour commencer, l’image dans son entièreté est la suivante :

La planche 66 se situe au beau milieu d’un ensemble contenu entre les pages 61 et 70 du Codex Borgia, ces dix pages représentant chacune deux « treizaines ». Ces séries de treize jours constituent des sorte de mois, constituant donc les fameux 260 jours (ici, nous avons donc 2 x 10 x 13). Chaque « treizaine » est présidée par une divinité différente. Ici c’est la déesse squelette Itzpapalotl. [21] Cette dernière est régulièrement figurée sous forme de papillon ou de chauve-souris. C’est une divinité associée à la mort, à la guerre et aux sacrifices humains. Selon les mythes aztèques, elle fait partie des divinités majeures du Tamoanchan. Et le Tamoanchan figure justement face à celle-ci sur la page du Codex : c’est l’arbre-serpent fendu (certainement un Ceiba) d’où émerge du sang.

Le Tamoanchan représente l’axe du cosmos, un axe central qui unifie les contraires. Il est un symbole double, de punition et de mort pour certaines divinités, mais également d’origine de la vie de l’homme et de sa faculté à se reproduire. Ce lieu mythique est symbolisé de plusieurs façons, d’un simple arbre unique, fendu ou non, s’ouvrant sur les opposés, à une série d’arbres associés aux extrémités encerclant le monde. [22] On retrouve ici un classique mésoaméricain, l’association d’une image de mort (Itzpapalotl) à une image de vie (le Tamoanchan, forme de paradis).

L’arbre qu’Anton Parks identifie à une prêtresse est donc un lieu mythique, et non une personne et une caste d’individus !

La signification de cette représentation de Tamoanchan est incertaine. L’on pourrait y voir le sang des anciennes humanités (récupéré depuis Mictlan, le Monde inférieur de la tradition locale) qui selon le frère franciscain et historien espagnol Gerónimo de Mendieta, d’après les Aztèques qu’il a interrogés, servait à créer les hommes de l’humanité suivante - l’humanité actuelle étant la cinquième selon les croyances aztèques (la quatrième pour les Mayas). [23]

Quant à l’association par Parks du serpent, de l’arbre et du récit du jardin d’Eden, elle est abusive. Dans l’iconographie précolombienne, les racines des arbres sont parfois figurées comme des serpents, du simple fait que les reptiles rampants s’enfoncent dans le sol.

Le sens global de cette planche du Codex Borgia n’est pas clair. Au centre, nous voyons clairement un temple, et semble-t-il un homme mort tombé de son trône (on retrouve la forme en escalier avec les trois points que l’on retrouve deux illustrations au-dessus). L’homme à droite est assez étrange : position bras croisés (à la manière d’une momie inca) avec un bandeau sur les yeux… Itzpapalotl a l’air d’avoir une tête d’aigle à sa gauche, symbole que l’on retrouve ailleurs dans le Codex Borgia associé une fois de plus au serpent et à l’arbre Tamoanchan.

Bref, l’interprétation est peut-être compliquée, mais le symbolisme est classique. Anton Parks comble ce vide interprétatif avec une histoire d’initiation à la sexualité par des prêtresses extra-terrestres.

Et une fois de plus, il décontextualise, mutile et réinterprète des représentations par le prisme des Anciens Astronautes.

Musgir (MUS-GIR10), litt. « reptile furieux », à rapprocher de son homophone MUS-GIR « dragon ». Ce dragon était terriblement redouté par les Mésopotamiens. Les Sumériens le dénommaient Musgir ou Mushus et les Assyro-babylonniens Pazuzu. Petite figurine en jaspe rouge, époque néo-assyrienne (réf. AO 26056), Musée du Louvre. [24]

Cela devient lassant. Un peu épuisant même. Une fois encore Anton Parks mélange des choses qui n’ont rien à voir ensemble.

Il évoque dans son texte des guerriers reptiliens ailés de trois mètres de haut (des Musgir) qu’il assimile aux gargouilles ou encore à Pazuzu un démon secondaire d’ancienne Mésopotamie, tout en rapprochant l’ensemble du muš-gir2 des Sumériens.

Commençons par la définition du terme sumérien en question (muš-gir2) en nous basant sur le Pennsylvania Sumerian Dictionary Project [25] :

Il s’agit donc un serpent à crocs. Loin d’un démon ailé…
Ensuite ce terme n’est jamais associé dans aucune incantation avec Pazuzu.

Qui était donc Pazuzu ?
Une divinité secondaire tardive (Ier millénaire BCE), roi des démons du vent, qui contrairement aux Musgir de Parks (qui dépeçaient leurs victimes pour en dévorer la chair) possédait un rôle prophylactique, protégeant ceux qui l’invoquaient ou le portaient sous forme d’amulette de toutes formes de maladies. Il était réputé également pour la protection des femmes enceintes et des nouveaux nés. [26]

Voilà comment procède Parks presque à chaque fois : il trouve un mot, le fait correspondre à une créature de son récit en transformant son sens premier, l’associe à une autre créature mythologique n’ayant aucun rapport avec le mot initial (et parfois éloigné dans le temps comme c’est le cas ici), ignorant (ou feignant d’ignorer pour son lectorat) des éléments essentiels se contredisant (ici un guerrier anthropophage alien, un serpent à crocs et un démon protecteur !)

34-Codex maya de Madrid, planche 30. Représentation de Ixchel (la déesse de l’arc-en-ciel), divinité de la fertilité féminine, de la médecine et de la lune. L’association entre cette déesse des fluides féminins et l’arc-en-ciel n’est pas comprise à ce jour, pourtant une bonne interprétation du texte qui accompagne cette illustration nous donne l’explication du mystère : « l’étoile relâche de l’eau, la sève des profondeurs de la mère éclatante élève le fil tordu ». Ceci signifie que les fluides corporels de la déesse apportent l’élévation de la conscience en faisant monter l’énergie le long de la Kundalinî grâce au fil tordu, c’est-à-dire aux courants subtils Ida et Pingalâ, s’élevant en deux mouvements sinusoïdaux, tels deux serpents le long de la colonne vertébrale. Le rapprochement que nous pouvons faire entre la Kundalinî et l’arc-en-ciel saute aux yeux lorsque l’on sait que les sept chakras principaux possèdent symboliquement les couleurs de l’arc-en-ciel... [27]

La planche complète est la suivante :

Il s’agirait bien d’Ixchel (ou Chac Chel), déesse des eaux horizontales, d’où la présence de Chac (l’équivalent du Tlaloc aztèque chez les Mayas) en bleu à ses pieds, en bas à droite. Chac, ce sont les eaux de pluie, il est donc la complémentarité directe des eaux horizontales (les inondations par exemple).

Nous sommes face à une belle imposture d’Anton Parks qui retire une fois de plus tous les éléments qui le dérange notamment le dieu Chac qui associe clairement la déesse Ix Chel aux pluies qui déclenchent des inondations, qu’elle préside en tant que déesse des eaux horizontales.

Quant au rapport avec la Kundalini, on ne sait pas trop où il s’insère avec la déesse des inondations…

Codex mexicain de Borgia, planche 74. La déesse de la Terre et de la lune, Tlazoltéotl, offre ses menstrues dans un récipient. À la vue de cette représentation, il n’est pas étonnant que cette déesse soit aussi dénommée "la mangeuse d’immondices", car elle est celle qui offre et fait manger ses "menstrues". Tout est là sous nos yeux. Chez les Mayas, "menstrues" s’exprime par la voyelle U, qui veut également dire "lune" et "vase". Comme par enchantement, le Û sumérien possède plusieurs significations parfaitement synonymes dans ce contexte : "plante", "nourriture", puissance"... ce qui nous renvoie une fois de plus à l’arbre de la Genèse dont les fruits sont interdits. [28]

Parler de voyelle « U » en maya, cela ne veut strictement rien dire ; le maya est une langue mono ou bi-syllabique. Une voyelle a donc plusieurs prononciations différentes. Ainsi, lorsque l’on retranscrit le maya avec notre alphabet, on double parfois la lettre, on ajoute des apostrophes ou des « h » pour indiquer des tonalités particulières, selon que l’on appuie sur le ton, que le son soit aspiré, etc. En somme, « U », cela n’existe pas.

Une fois encore Anton Parks démontre son inconsistance en linguistique. Mais nous savions déjà, passons.

Niveau culturel ce n’est pas mieux, Anton Parks évoque la déesse Tlazolteotl, mais rien n’est moins sûr. Il peut tout aussi bien s’agir d’une « cihuateteo », une femme morte en couches. Ou même d’un mélange de l’une et de l’autre, les représentations indiennes faisant régulièrement ce genre d’associations.

Citons Wikipédia à propos de la mort en couches : « Cette mort est considérée comme une mort au combat et ses victimes sont honorées en tant que guerriers morts [29] » Cela justifierait d’autant plus la présence des deux têtes d’animaux, dont un aigle de façon certaine en haut à droite. Et également la présence d’un couteau sacrificiel sous le pied droit.

Autre problème : la forme sous la figure féminine ne sont pas des immondices. Il s’agit de liquide, ce qu’indiquent les volutes, toujours liées à de l’air ou du liquide. Autre élément loin d’être anodin, le personnage est à l’intérieur d’une maison !
Enfin, le symbole entre le couteau et le liquide pourrait être un renvoi à Tlaloc, le dieu de la pluie (sa barbiche et ses dents en version simplifiée), cela serait d’autant plus logique de l’associer avec l’eau de l’accouchement et la mort possible de l’enfant.

Tlaloc a la charge des morts noyés. Ainsi, les enfants mort-nés vont dans le Chichihuacuauhco, qui est souvent considéré comme un appendice du Tlalocan (le lieu des morts liés à Tlaloc, c’est-à-dire à la pluie, à la foudre, à l’eau). Tout est donc logique dans cette image que Parks persiste à transformer via son filtre personnel.

Codex Borgia

Cylindre sumérien présentant Enki (à gauche) auprès d’un des Adam (animaux-colonisés) fraîchement sortis d’une matrice artificielle. À droite une Ninti aidée d’un "dieu" ouvre une matrice artificielle d’où sort une "divinité" déjà formée. Notez le signe MURUB ("vulve"), symbole de procréation, dans la main de la Ninti. Musée du Louvre AO 2485. [30]

Encore une fois Anton Parks a tout faux. Il n’y a pas Enki sur la photo ni même de Ninti. Il ne s’agit pas d’une matrice artificielle mais du « Soleil » Nergal qui émerge d’une montagne (voir les rayons qui émanent de son corps pour se convaincre qu’il s’agit de notre étoile).

La définition du Musée du Louvre, magistralement ignorée par M. Parks, présente pourtant très simplement la scène :

« Victoire de Nergal, dieu du soleil brûlant de l’été, et de Gibil, personnification du feu. Nergal règne dans les Enfers symbolisés par la montagne où il retient captif l’homme-taureau, personnification de la végétation estivale. [31] »

La création de la nouvelle Eve est clairement issue d’une matrice artificielle qui porte le signe sumérien archaïque de Dim’mege (Lilith). Enki, le serpent (à gauche), veille sur le couple humain. Derrière, Enlil le grand Sàtam souhaite réduire l’humanité. Le Gullum (le chat) décomposé en GUL-LUM est ici pour traduire l’idée de "détruire l’abondance". Cylindre sumérien BM 123279. [32]

Avec son obsession pour les matrices artificielles, une fois de plus, Anton Parks éloigne son lectorat de morceaux mythologiques majeurs comme ici.

Nous assistons à la capture et la descente de Dumuzi, consort de la déesse Inanna, dans le monde inférieur par des démons. Contrairement à Parks nous ne voyons pas Enlil debout sur un chat (dont le nom donnerait un obscur rébus dont seul M. Parks a le secret) mais bien Inanna qui assiste, impuissante, à l’enlèvement de son époux.

Dans les figurations archaïques comme celle-ci, la déesse guerrière était bel et bien représentée sous son aspect guerrier avec une arme à la main, debout sur un lion et dotée… d’une barbe afin de souligner sa férocité masculine ! [33]

L’auteur des Chroniques du Girku y voit encore une création d’un être humain par le génie génétique des Aliens. Simpliste, on vous dit…

De nombreuses inscriptions et illustrations de par le monde manifestent la voracité des "dieux" reptiliens. Les singes (Ugubi) ou les premiers Homo (Ukubi) et ensuite les humains en ont fait les frais comme le démontre explicitement le Codex Borgia des anciens mexicains, planche 67. [34]

Terminons en beauté avec cette planche du Codex Borgia. Une fois encore, élaguée par Anton Parks :

Celle-ci ne montre évidemment pas que des dieux reptiliens de l’espace mangeaient des êtres humains (sic !) mais une cérémonie sacrificielle rituelle en l’honneur du dieu Xipe Totec. La description de son culte dans Wikipedia donne froid dans le dos :

« Son culte se déroule pendant le deuxième mois du calendrier aztèque, Tlacaxipehualiztli (littéralement : « écorchement des hommes »). Il implique des sacrifices humains, l’un de masse avec arrachage du coeur et l’autre réservé à l’élite des guerriers qui oppose un prisonnier volontaire de haut rang à des chevaliers aigles et des chevaliers jaguars.
Le sacrifice consiste à arracher le coeur du sacrifié, qui a vécu comme un prince pendant l’année qui précède le sacrifice et qui est drogué aux champignons hallucinogènes pour ne pas se rendre compte de ce qui lui arrive, puis à retirer sa peau. Le prêtre la portera sur lui pendant un mois.
Une autre technique consiste à percer les victimes avec des flèches afin que leur sang inonde le sol comme une pluie fertilisante. Puis le prêtre sacrificateur revêt sa peau qui, comme dans la première forme du rite, était portée comme un vêtement pendant un mois aztèque. [35] »

La peau du sacrifié peut également être utilisée, portée pendant un mois, pour soigner les maladies de peau, ou contre l’obésité. Les peuples mésoaméricains, au contraire des Européens de la même époque, se lavent quotidiennement ou presque. Au-delà de l’aspect macabre du mois passé revêtu de la peau d’un mort, ne pas se laver est une anormalité.
Ces rituels sont bien plus effrayants que les fantasmagoriques Gina’abul d’Anton Parks !

En outre l’animal hybride qui avale un homme en face de Xipe Totec porte les attributs de Quetzalcoatl, le « serpent à plumes » de la tradition aztèque, qui selon toute vraisemblance à un rôle dans le sacrifice humain. On retrouve d’ailleurs le même type de mise en scène d’un tel face à face entre Xipe Totec et un serpent dévoreur dans le Codex Borbonicus par exemple.

Codex Borbonicus

Selon les dernières recherches de Dimitri Karadimas, directeur de recherches au CNRS, les figurations classiques de Quetzalcoatl ne représenteraient pas un serpent mais… une chenille ! Ce qui fait s’écrouler l’argument d’Anton Parks quant à la consommation de chair humaine par les Gina’abul sauf à croire que les Gina’abul étaient en fait des chenilles de l’espace !

Citons Karadimas : « La figure des serpents fantastiques dans l’univers représentationnel mésoaméricain doit être mise en parallèle avec la place occupée, dans ce même univers, par les lépidoptères et permettre ainsi de reconnaître que ces « serpents » sont une mise en images des parties que constituent des êtres réels, à savoir les formes larvaires des papillons. La permanence dans le temps de ces traits, dans les différentes sociétés précolombiennes du Mexique, montre que le processus de perception de l’environnement en tant que « lecture analogique », propre à l’esprit humain, est la marque, dans cet espace culturel, d’une attention particulière aux formes signifiantes apparaissant au sein d’êtres ou d’espèces qui servent dans les processus de nomination et/ou dans la création des êtres mythologiques. Si la figure mythologique du serpent à plumes, qui donnera naissance au Quetzalcóatl du Postclassique, se construit à partir de la chenille hautement urticante d’un papillon de nuit, Automeris io qui, sous sa forme adulte, offre un mimétisme construit sur l’image d’une face de chouette ou de jaguar et que ces derniers animaux se retrouvent combinés dans des artéfacts à forme de papillon, comme dans le cas de la coiffe des urnes zapotèques par exemple, alors c’est l’ensemble des formes culturelles de cette aire qu’il faut réinterroger au regard de ce constat. »

Son article Voir une chenille, dessiner un serpent à plumes. Une relecture analogique de l’hybridité et des êtres imaginaires en Mésoamérique préhispanique est librement consultable sur openeditions.org (voir note de bas de page). [36] Nous vous conseillons fortement de vous y référer pour plus de détails sur la confusion/l’assimilation entre le serpent et la chenille Automeris io, dont le poison tue un homme dans d’horribles souffrances en quelques heures.

Que rajouter ?

En conclusion, nous sommes toujours sur le même schéma.
Anton Parks ne comprend pas ce qu’il voit, n’a aucune compétence dans l’analyse symbolique, numérologique ou culturelle des planches de Codex mésoaméricains, des sceaux-cylindres mésopotamiens ou de l’iconographie liturgique des papyrus égyptiens qu’il reproduit dans ses ouvrages.

Pis, il décontextualise en permanence, mutilant ses illustrations, ignorant tout un tas d’éléments pour ne choisir que ce qui ressemble de loin à des matrices artificielles, des vagins géants, des rituels de sexualité sacrée ou mieux des vaisseaux spatiaux ! Autant d’éléments vers lesquels il redirige ses lecteurs qui boivent ses fadaises comme du petit lait.

Le cherry picking et le biais de confirmation sont toujours les meilleurs amis de l’auteur des
Chroniques du Girku, pourquoi s’en priverait-il ?

Puisque le contexte sanitaire est si grave et qu’il y a plus urgent à traiter que des questions de farfadets venus d’outre-espace pour s’accoupler avec des singes pour ensuite les faire dévorer par des gargouilles, autant considérer Anton Parks pour ce qu’il est, un clown.


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