Où l’on découvre que l’habit ne fait pas le moine, ni le chapeau l’Aventurier
Première partie - Dominique Jongbloed aventurier
Article mis en ligne le 8 juillet 2014

par Irna

Lien vers la 2ème partie : Où l’on découvre... deuxième partie

Lien vers la 3ème partie : Où l’on découvre... troisième partie

Il n’est pas dans mes habitudes d’écrire sur les antécédents ou les activités non directement liées aux « pyramides » de Bosnie de tel ou tel tenant de celles-ci, mes analyses et critiques portant très généralement sur les documents et arguments fournis. Sauf dans un cas : lorsque le tenant en question tente d’utiliser l’argument d’autorité, et d’usurper des qualifications ou des compétences qu’il n’a pas ; ainsi, lorsque M. Osmanagic se présente comme « académicien » ou « professeur d’anthropologie », ou lorsque le professeur Debertolis utilise ses qualifications académiques - réelles - pour imposer une vision pseudoscientifique de la préhistoire de Visoko.

Le cas de Dominique Jongbloed entre quelque peu dans cette catégorie : il se présente volontiers comme « spécialiste des civilisations antédiluviennes » - quoi que veuille dire cette expression - et, tout en annonçant continuellement rapports, publications d’analyses, partenariats avec des institutions scientifiques diverses, proclame facilement des « confirmations » pour lesquelles il ne fournit aucun élément de preuve. On est donc prié de le croire sur parole, de faire confiance au « spécialiste ». Il est donc légitime de chercher à en savoir un peu plus sur ce « spécialiste » qui se présente comme un aventurier expérimenté. Or l’enquête révèle quelques éléments assez curieux...

L’homme aux mille casquettes

Comme je l’avais noté ici, Dominique Jongbloed se dit écrivain, voyageur, et affectionne particulièrement le terme d’aventurier. S’il utilise parfois le terme d’historien spécialiste de l’ère dite antédiluvienne du Monde et des civilisations disparues, il se défend comme un beau diable d’être un scientifique ou un archéologue :

Pourtant, si l’on remonte un peu dans le temps et dans les versions successives de ses différents sites en utilisant l’archive d’internet, on le trouve successivement archéologue amateur en août 2006

écrivain - scénariste - explorateur et archéologue des civilisations Antédiluviennes en juin 2007

archéologue sous-marin (entre autres) en juin 2009

géographe, archéologue, paléoethnologue et cryptanalyste en octobre 2009

archéo-cryptanalyste (?) en novembre 2009.

C’est bien la première fois que je vois un scientifique aussi complet faire preuve d’une telle modestie et renoncer à toutes ses qualifications pour se présenter comme simple aventurier !

Mais ce n’est pas tout, on apprend ailleurs que notre aventurier a bien d’autres cordes à son arc : il est correcteur et infographe, journaliste-reporter, chef d’entreprise et conseil en gestion des affaires, ancien de l’Aéronavale et instructeur pour les préparations militaires, spécialiste en nettoyage industriel, et même pilote d’avion et d’ULM :

Bref, un homme véritablement universel !

Reste que quelques unes de ces casquettes sont, comme on va le voir, pour le moins douteuses, et que, comme il nous y invitait dans le message placé en exergue, il faut regarder les actes plutôt que se fier aux écrits...

L’Aventurier

Commençons donc par le titre dont il est le plus fier, celui d’Aventurier ou explorateur. Il rappelle en effet volontiers ses nombreuses expéditions (une vingtaine d’après cet article), et on peut en trouver une liste, au moins partielle, sur quelques pages archivées, par exemple celle-ci datant de 2009. La liste est impressionnante, même si certaines peuvent d’emblée paraître surprenantes, comme par exemple une expédition en Libye en 1993, en plein embargo international, à un moment où les relations entre la Libye et les Occidentaux sont particulièrement tendues.

De toutes ces expéditions, on cherchera pourtant vainement trace sur internet ailleurs que sur les pages de M. Jongbloed ; on cherchera surtout vainement la moindre photo ou vidéo d’aucune d’entre elles. Toutes les photos pouvant évoquer une expédition placées sur le site de l’Aventurier ou sa page Facebook sont, sans exception, des photos récupérées sur le net et dont il n’est pas l’auteur ni le propriétaire. Par exemple sur son mur Facebook on trouve cette photo de jeeps dans le désert :

photo qui provient de cette page Wikipedia, et dont l’auteur est identifié comme un certain Sharif Baasher. De même, la photo de la page d’accueil du site de Nordsud Institute (une forêt de Nouvelle-Zélande) :

se trouve également sur des sites de wallpapers et est sous copyright, la photo nocturne de montagne sur la page Facebook de son roman Shambala  :

provient du site du Groupe Militaire de Haute Montagne (photo 48), etc. etc.

Le fait de récupérer des photos sur internet n’est pas en soi particulièrement gênant, beaucoup de blogueurs le font ; mais dans le cas de l’Aventurier, c’est quand même étonnant à plus d’un titre :

 Les photos « empruntées » ne sont jamais attribuées : pas de source, pas d’auteur. Sur ses pages et dans ses livres, une vague mention « tous droits réservés » accompagne généralement les images, dont la source n’est quasiment jamais donnée (alors que la plupart sont assez faciles à retrouver sur le net). Ainsi par exemple pour cette photo du mont Kailash, page 97 de la version 2010 de Civilisations antédiluviennes [1] :

il n’est nulle part indiqué qu’elle provient du site de l’Université d’Oxford (Groupe de recherche sur la tectonique asiatique de Mike Searle)... [2]

 C’est d’autant plus étonnant que l’Aventurier se pose volontiers en donneur de leçons en matière de droit d’auteur :

allant même jusqu’à prétendre interdire tout droit de citation :

 Et c’est également d’autant plus étonnant que le même Aventurier promet depuis longtemps à ses fans de leur montrer les photos et films de ses expéditions ! Ainsi en 2008 :

ou en 2012 :

Photomontages

Au total, à l’exception de quelques photos prises dans la région PACA et de celles prises en Bosnie lors des EPR 1 et 2, on ne dispose en tout et pour tout que de deux photos de l’Aventurier « en action ». La première a été publiée par le journal Metronews dans cet article, on y voit M. Jongbloed posant devant le site mégalithique de Badrulchau dans l’archipel de Palau :

Malheureusement - en tout cas pour la crédibilité du journaliste de Metronews - cette photo est un montage des deux photos ci-dessous :

La première vient du propre livre de M. Jongbloed, Civilisations antédiluviennes (page 151 de la version 2010) :

et la deuxième est une photo de presse, aujourd’hui disparue du site de l’Aventurier mais utilisée dans un autre montage pour une couverture éphémère de son livre sur les « pyramides » de Bosnie :

et dont il reste des traces dans l’archive du web pour janvier 2014 :

Le montage est assez grossier, puisque l’Aventurier y a perdu un morceau de bras :

et a été épinglé par un journaliste en décembre 2013.

La deuxième photo était volontiers envoyée par l’Aventurier à ses fans comme preuve de la précocité de sa vocation, et à une époque figurait en bonne place sur son site sous le titre "Dominique à 25 ans" :

Là encore, il s’agit d’un montage, d’une part d’une photo d’Ollantaytambo (attribuée par erreur à Macchu Pichu sur un des sites qui l’utilisent) :

et d’autre part d’une photo de M. Jongbloed jeune, qu’on trouve par exemple dans la présentation de ses conférences (page 2) :

La comparaison des deux photos, le montage et la photo d’origine d’Ollantaytambo, par exemple avec le logiciel DiffImg, est parlante :

Les pixels colorés correspondent aux différences entre les deux images.

De l’importance du patronyme en russe

On a donc un Aventurier qui a fait le tour du monde, visité tous les lieux mystérieux de la planète, mais qui, sans doute par modestie, n’ose pas diffuser la moindre photo de ses voyages... Des mauvaises langues pourraient en venir à douter de la réalité de ces expéditions - et il est vrai que, pour certaines d’entre elles, la question peut se poser. Prenons l’exemple de l’expédition « Shambala » (« L’impossible expédition ») que prépare M. Jongbloed. Il a affirmé, à plusieurs reprises, avoir déjà réalisé une, voire deux expéditions dans l’Himalaya à la recherche de cette cité mythique, ainsi en octobre 2009, la mention d’une expédition « Shambala1 » en 2001 :

En février 2008, un projet d’expédition vers la même cité est numéroté « Shambala III », laissant supposer qu’il y en a eu deux auparavant :

Et plus récemment, M. Jongbloed mentionne sur la page Facebook de son roman Shambala une découverte qu’il aurait faite en 2003 :

Ces expéditions dans l’Himalaya sont associées par l’Aventurier avec le nom et les expéditions d’un certain Youri Zakharov (qu’il épelle tantôt « Sakharov », tantôt « Sahkarov »...), dont il laisse entendre qu’il l’a, sinon accompagné dans ses expéditions, au moins rencontré :

Zakharov est présenté par lui comme un personnage âgé (« solide pour son âge »), membre, voire président, de l’Académie des Sciences de Russie, décédé en 2010, et dont les travaux seraient inaccessibles. Une photographie de lui est même publiée dans Civilisations antédiluviennes (page 95 de la version 2010) :

Pas de chance, la photographie est celle d’un certain Youri Dimitrievitch Zakharov, géologue et paléontologue, qui est bien membre de l’Académie des Sciences de Russie, mais qui n’a strictement rien à voir avec Shambala. Le "vrai" Zakharov, celui qui a effectivement réalisé une expédition dans l’Himalaya en 2004, s’appelle Youri Aleksandrovitch Zakharov, et il n’est pas membre, encore moins président, de l’Académie des Sciences, tout au plus « membre correspondant » de l’Académie des Sciences Naturelles de Russie, la même pseudo-académie dont est membre Semir Osmanagic ainsi que quelques autres clowns et charlatans. Malgré ses titres ronflants, c’est très probablement à cette dernière catégorie que ce Zakharov-là appartient : il prétend avoir découvert le secret de la jeunesse éternelle, guérir toutes les maladies possibles et imaginables et en particulier le cancer, voir par exemple ici. Que cela n’empêche pas le lecteur d’aller voir la chaîne YouTube que, loin d’être mort en 2010, il continue à alimenter : on y trouve deux films sur son expédition au Tibet, films où n’apparaît pas l’ombre du chapeau de M. Jongbloed...

Bref, l’Aventurier n’a pas rencontré Zakharov, n’a pas travaillé avec lui, et n’a très probablement jamais mis les pieds dans l’Himalaya...

Expéditions ratées ?

D’autres expéditions semblent n’avoir guère plus de réalité. Une expédition intitulée « Chronos » (correspondant à la « transsaharienne » de 2007 indiquée sur cette page) a suscité l’hilarité des intervenants sur les forums où M. Jongbloed l’a décrite ("CRA IGNA" est très probablement un pseudo de l’Aventurier : à cette époque-là, il présidait une association nommée « Centre de Recherches Archéologiques Ignatius Donnelly » dont le site était « atlantisworld.org »). On reconnaît dans la description la « patte » de l’Aventurier, ainsi d’ailleurs que dans le message de menaces dont il avait gratifié les propriétaires du forum, peu satisfait de leur accueil :

Dans le même genre, une autre annonce d’expédition a reçu un accueil assez frais, c’est celle intitulée « Anteus », pour laquelle un communiqué de presse a été envoyé en juin 2006 à ce site. Les commentaires du webmestre sont assez savoureux (voir en particulier ses remarques sur les « sponsors en cours de négociation » ! on a déjà vu, à propos de M. Jongbloed, avec quelle facilité il transformait de simples fournisseurs en sponsors, voir l’affaire du détecteur de chauves-souris Magenta !), de même que ses réponses au "droit de réponse" de M. Jongbloed. Il faut dire que le communiqué de presse était accompagné d’un fichier pdf qui était probablement celui-ci :

Anteus

où l’on apprend entre autres que M. Jongbloed a conçu pour cette expédition un nouvel outil, un « Sondeur multifréquences vertical à résonances discriminatoires fractales de masses »...

Ce projet d’expédition ne semble pas avoir eu de suite : s’il était encore annoncé sur le site « atlantisworld.org » en février 2007, le site disparaît par la suite du web et on ne trouve plus aucune mention d’Anteus... sauf en 2009, où est réalisé un trailer présentant l’expédition comme réalisée, mais ne comportant que des images piochées sur le net et le fake évoqué plus haut et publié par Metronews :


Atlantys 1 - Trailer par MYSTERIA-TEMPORIS

D’autres expéditions ont également laissé quelques traces sur internet, mais toujours avant leur départ ! Ainsi, un projet d’expédition en baie de Douarnenez, à la recherche de la ville légendaire d’Ys, a fait l’objet de plusieurs articles dans la presse bretonne : un premier en février 2009, annonçant l’expé pour mars de la même année ; mais en février 2010, on apprend que l’expédition n’a pas eu lieu, et que le projet est repoussé à 2011, « pour raisons administratives ». Les raisons administratives en question sont tout simplement, comme on l’apprend en mars de la même année, que l’Aventurier avait oublié que toute exploration des fonds marins nécessitait une autorisation de l’Etat. Par la suite, il ne sera plus jamais question de la ville d’Ys... Autre expédition tombée à l’eau - mais cette fois dans l’eau du Rhin - celle au Mur Païen en Alsace : annoncée par un communiqué de presse signé « JONGBLOED » en janvier 2009, elle est ensuite démentie par « le secrétariat de Dominique Jongbloed » en mai 2011 dans les commentaires du communiqué. Il est précisé que les fonds n’ont pas pu être réunis, ni une équipe « de gens suffisamment compétents ». Pourtant, le projet était assez avancé pour qu’un flyer annonçant l’expédition, avec une équipe « additionnant 70 ans d’expérience » et avec le « patronnage [sic !] du Service Archéologique d’Alsace et de la Société de Géographie de Paris », ait été produit :

Une autre expédition a beaucoup fait parler d’elle, Dominique Jongbloed, sous divers pseudos (ou peut-être certains de ses fans), l’ayant annoncée sur de multiples forums : il s’agit de l’expédition intitulée « Atlantys » visant à retrouver les traces de l’Atlantide dans la région des Bimini, voir par exemple ici, ici (où l’annonce a été reçue avec scepticisme) ou . Prévue au départ pour juin 2008, elle n’est plus qu’en « préparation » en juillet de la même année. En octobre de la même année, l’expédition paraît condamnée par manque de fonds et par « l’incrédulité des chercheurs » ; et pourtant elle donne lieu le même mois à une interview dans le magazine Géo, où l’on apprend que le budget de 200 000 € est bouclé, et dont la teneur (matériel « de fou furieux » donné par des sponsors, collaboration de scientifiques et d’institutions qu’on ne peut nommer...) devrait rappeler quelque chose à ceux qui ont lu cet article... Enfin en février 2009 une date de départ est fixée au mois de mai et annoncée à la presse, avec confirmation que « en quelques semaines, il a réuni les 200 000 euros nécessaires à son budget ».

Le départ de l’expédition est précédé de conférences, et d’une campagne de recherche de sponsors. On peut trouver par exemple ici une trace de cette campagne, avec en particulier un dossier de « sponsoring » assez intéressant :

Sponsoring Nomadys

M. Jongbloed y présente en effet (page 4) une découverte extraordinaire de colonnes d’un temple sous-marin, découverte qu’il attribue à une équipe de la fondation ARE Edgar Cayce menée par Greg Little et Bill Donato :

Or, si les expéditions de l’ARE ont bien eu lieu, aucune d’entre elles n’a rapporté les photos que montre M. Jongbloed. D’où viennent celles-ci ? D’un documentaire, non pas sur les travaux de l’ARE, mais sur la pseudo-découverte, par un certain Ray ou Raymond Brown, d’une pyramide gigantesque dans les Bahamas, découverte qui est en partie à l’origine du hoax sur les « pyramides de cristal » des Bermudes. On trouve en effet dans ce documentaire de History Channel la source des trois images utilisées par M. Jongbloed : à 5:57, 6:11 et 6:42 :

Ce que M. Jongbloed oublie également de dire, c’est que ces images sont très clairement présentées dans le documentaire comme des reconstitutions : « Dr. Brown’s story begins uneventfully, on an expedition out of Miami in 1970, here recreated » (4:43), puisque le bon Dr. Brown n’a aucun document confirmant sa découverte : « Dr. Brown’s photographs were destroyed in a storm, thus making it impossible for a detailed record of the find » (6:07). Il faut dire à sa décharge que, d’après certains de ses anciens co-équipiers, et de façon assez surprenante pour un globe-trotter ayant voyagé dans le monde entier, M. Jongbloed ne semble pas vraiment parler anglais - ce qui expliquerait aussi les lamentables traductions Google des versions anglaises de ses sites...

Bref, il n’est pas possible que ce soit l’ARE qui ait communiqué ces images à l’Aventurier, ni qu’il ait été à leur propos « contacté par l’équipe des découvreurs » - d’autant que la présence du logo de la chaîne History Channel sur les images rend évident le fait qu’il ne s’agit pas des images originales. C’est pourtant celles-là qu’il utilise pour attirer les sponsors, en leur promettant des retombées économiques et un battage médiatique sans précédent : « Conférence de Presse à la Société de Géographie à PARIS le 24 Juin 2008 », c’est-à-dire la veille du départ ; à la fin de l’expédition « Convocation de la Presse et du Service du Patrimoine Mondial à l’UNESCO. Validation officielle en présence de représentants des gouvernements des Bahamas, américains et français. » ; « suivi de l’expédition [...] via Internet, non seulement sur le site www.civilisationsantediluvienneslelivre-lefilm.com, mais sur plus de 30 forums » ; « Un certain nombre de journaux sont invités à suivre l’actualité de l’expédition. Nous ne pouvons les citer tous car entre les USA et la France cela totalise plus de 160 Journaux » ; « Une conférence de Presse est prévue, en cas de découverte majeure, au Musée des Sciences de MIAMI, en Floride » ; « Présentation du film documentaire au Festival EXPLORIMAGES à Nice en novembre 2008 et au Festival du film d’aventure de MONTREAL » ; « Tournée de conférences dans toute la France et les DOM TOM en 2009 » ; etc... On trouve même, par exemple sur ce site, la mention d’une offre d’un million de dollars par CNN pour les images de l’expédition, sans qu’on sache si c’est une invention du webmestre, ou s’il se contente de retranscrire ce que l’Aventurier lui a dit...

Que s’est-il passé ensuite ? Officiellement l’expédition est partie du 28 avril au 9 mai 2009. Pas de suivi par internet, pas de nouvelles dans les journaux, pas de conférence de presse... L’expédition ne sera plus jamais mentionnée, sauf dans un laconique communiqué de presse publié le 15 mai sur le site de Cap Aventures (l’agence de presse maison de Dominique Jongbloed) et sur le site de l’Aventurier. Résultat de l’expédition selon ce dernier ? « Je ne peux dire que nous n’avons rien trouvé, je ne peux davantage dire l’inverse », c’est d’une précision... La faute en revient aux sponsors insuffisants (« l’absence cruelle de sponsors importants en 2008 ainsi que cette année nous a rendus définitivement inopérants pour de telles expéditions »), alors même que les interviews mentionnées plus haut affirmaient le contraire...

Depuis, pas un texte, pas une photo, pas une vidéo, au point qu’on peut se demander si « l’expédition » a jamais dépassé la banlieue d’Aix-en-Provence...

Pour mémoire, on observe là un schéma assez répétitif, qui est à peu près le même que celui déjà noté pour l’expédition bosnienne de M. Jongbloed : effets d’annonce avant le départ (matériel de « fou furieux », sponsors, conférences qui vont révolutionner le monde et l’histoire...), puis plus rien, ou quelques vagues affirmations sans aucune documentation...

Aventures à suivre ?

On peut encore trouver d’autres exemples sur les anciennes pages de l’Aventurier d’expéditions annoncées puis abandonnées : expédition « Tartessos IV », annoncée pour octobre 2007, puis reportée, toujours en projet en décembre 2008, puis plus rien ; nouvelle expédition « Shambala », annoncée en 2007, en projet en 2008, programme de l’expédition et appel aux dons en septembre 2009, puis départ fixé au 10 décembre 2010, puis plus rien ; projets d’expédition à Taïwan et à Yonaguni en 2008, sans suites...

La boulimie pour les annonces d’expéditions de l’Aventurier n’a pas de limites, puisque d’autres annonces sensationnelles se succèdent plus récemment : expédition à Santorin, contrats pour des forages dans le désert, des explorations en Amazonie, Afrique, Chine, possible reprise d’une expédition Shambala avec une allusion à un « projet svastika », expédition au Pôle Nord avec 4 records à battre...

Ce dernier projet, vers le Pôle Nord, est assez intéressant, en ce qu’il révèle du fonctionnement de M. Jongbloed ; il s’agit d’un projet relativement ancien, lancé au moins en 2012 (il est annoncé dans cet article d’avril 2012) et mentionné jusque fin 2013 sur le site de son association sous l’intitulé « Hyperborea ». Le projet avait également une page Facebook dédiée, créée en avril 2012, aujourd’hui disparue :

On y apprend en juin 2012 que M. Jongbloed cherche des équipiers pour l’expédition :

et en septembre de la même année que l’équipe est sans doute trouvée puisqu’il annonce un entraînement dans le Jura pour décembre :

En octobre 2012 le « roadbook » est prêt et va être adressé aux sponsors :

Parmi les sponsors mentionnés, certains sont indiqués comme n’ayant « pas encore donné leur réponse définitive » ; on peut donc supposer que les autres ont, au contraire, confirmé leur participation. On y trouve les Montres Patton : renseignements pris, cette société n’a jamais sponsorisé l’expédition :

Un autre post, de décembre 2012, évoque une « Discussion au plus haut niveau avec la direction de BRP (Canada), monsieur José BOISJOLI », la société BRP-Bombardier étant censée fournir des Ski-Doo gratuits pour l’expédition, le tout illustré d’une photographie de M. Boisjoli prise ici :

Là encore, le siège de BRP Canada n’est pas au courant de ce sponsoring :

sponsoring qui semble bien s’être résumé à une visite de M. Jongbloed à la concession BRP d’Aubagne :

Qu’à cela ne tienne, le projet avance : le 1er décembre 2012, on commence le recrutement de bénévoles acceptant de travailler en 3x8 pour assurer la logistique de l’expédition :

Pas tout à fait bénévoles quand même, puisqu’on leur offre « la tenue de l’expédition »...

Le 18 décembre 2012, lancement d’une opération de recrutement à l’étranger :

puis lancement d’une opération de communication le 23 janvier 2013 :

en même temps que des sites amis publient l’annonce de l’expédition.

Le 1er février 2013, victoire, la plaquette de présentation est terminée et va être envoyée aux sponsors (tiens, les sponsors cités précédemment n’avaient pas eu de présentation du projet ?) :

Ah, non, pardon, ça sera pour le week-end d’après :

Et puis peut-être pas, après tout, il manque encore quelques détails...

Deux mois plus tard, le travail semble enfin fini :

et on repart dans les grands projets : participation de National Geographic, et même de l’armée canadienne...

Ah oui, mais Dominique Jongbloed ne peut pas être partout à la fois, partie remise à 2014 :

Sauf que l’on apprend, en août 2013, que le projet n’est peut-être pas si avancé que ça, finalement :

La plaquette de présentation n’est en fait pas finie, l’équipe est incomplète, les accords avec les sponsors ne sont pas finalisés, le roadbook reste à établir...

L’expédition Hyperborea a ensuite discrètement disparu des pages de M. Jongbloed fin 2013, en même temps que s’évanouissait la page Facebook du même nom... Une allusion y est faite de temps en temps, mais quasiment comme si c’était un nouveau projet, ainsi en janvier 2014 :

Il est probable que le projet ressortira un jour ou l’autre, comme l’ont fait avant lui d’autres projets comme « Shambala », et que la page Hyperborea renaîtra de ses cendres, nettoyée de toutes les scories qui pourraient laisser croire à un projet quasi-imaginaire. Heureusement pour lui, le public de M. Jongbloed se renouvelle rapidement, il y a un turn-over important qui fait que ses lecteurs n’ont généralement pas conscience du caractère très répétitif de ses effets d’annonce.

Cette répétition d’un schéma quasi-immuable caractérise également, comme on le verra dans l’article suivant, une bonne partie des autres « activités » de M. Jongbloed.

Suite : Où l’on découvre... deuxième partie