"Perception - de la caverne de Platon aux chambres sonores de Barabar"
Avis sur une conférence de Patrice Pouillard
Article mis en ligne le 3 octobre 2021

par Gollum Illuminati, Jaco Patrolman, Laurent Tlacuilo, rationnelitude

Patrice Pouillard a récemment publié en accès payant (12 euros) une conférence qu’il a donnée en septembre 2021 on ne sait pas trop où, et qui s’intitule "Perception - de la caverne de Platon aux chambres sonores de Barabar". Vous trouverez ci-dessous quelques avis sur cette conférence.


Avis de Gollum Illuminati :

C’est avec curiosité et espoir d’en découvrir plus sur les grottes de Barabar que nous avons visionné cette vidéo de plus de trois heures qui a l’ambition de « changer votre regard sur notre monde ».

Alors, de quoi ça parle ? Difficile d’en faire un résumé tant le discours délivré par Patrice Pouillard est totalement décousu et s’éparpille dans toutes les directions, pour finalement ne consacrer que quelques minutes aux grottes indiennes.

Patrice Pouillard entame son exposé en affirmant que son film LRDP aurait été attaqué sur la forme, mais qu’aucun de ses détracteurs ne se serait jamais intéressé au fond. C’est assez osé de tenir ces propos lorsque l’on connaît le nombre d’articles et de vidéos qui décortiquent justement chacune des affirmations du film, et depuis toutes ces années il semble assez improbable que Patrice Pouillard ne soit jamais tombé sur un de ces debunkages en bonne et due forme.

En partant de l’allégorie de la caverne de Platon, Patrice Pouillard se met à la place de celui qui se serait libéré de ses chaînes, et aurait eu accès à la vérité. Vérité que les autres habitants de la grotte, toujours enchaînés, refuseraient d’accepter, la rejetant avec véhémence. Comprendre que cette vérité qui dérange serait le message caché par les mystérieux bâtisseurs des pyramides et des grottes de Barabar, les hommes enchaînés dans la grotte représentant les archéologues dogmatiques incapables de remettre leurs croyances en question. On croit rêver.

Et de continuer en nous expliquant que lui pratiquerait le doute raisonnable, face à des scientifiques enfermés dans un doute systématique rejetant toute proposition qui contredirait leurs hypothèses sans jamais s’intéresser aux preuves avancées. Heum.

Un peu plus loin dans la conférence, on apprend que Patrice Pouillard ne se serait aperçu de la mythomanie de Jacques Grimault qu’en 2015. Il lui en aura fallu du temps. Pourtant cela ne semble pas l’amener à se demander si son informateur secret ne lui aurait pas raconté n’importe quoi lors de l’écriture du film LRDP…

On enchaîne ensuite sur une anecdote concernant… la perte de son blouson. Pendant de très longues minutes, Patrice Pouillard nous raconte comment, dans sa jeunesse, il avait fait l’acquisition d’un blouson assez onéreux. Un jour, pas de bol, voilà qu’il perd son fameux blouson. Il était bien triste, et certain de ne plus jamais retrouver son précieux. Mais quelques jours plus tard, chose incroyable, voilà qu’il reçoit un appel du service des objets trouvés, et on lui apprend que l’on a retrouvé son blouson. Je vous vois sourire derrière votre écran - mais tout cela est raconté avec le plus grand sérieux, et pendant de très très longues minutes. Vous vous demandez sans doute où il veut en venir avec cette histoire de blouson perdu puis retrouvé ? Eh bien ce témoignage est là pour nous expliquer que la synchronicité, ça existe. Patrice était triste et rempli de pensées négatives, ce qui a conduit à la perte de son blouson fétiche. Mais après l’avoir perdu, il a eu un déclic et a décidé de ne pas s’en faire et de se concentrer sur des pensées positives. Et c’est là que le miracle est survenu : ayant choisi d’opter pour un état d’esprit positif, il lui arriva des choses positives, à savoir que son blouson finit par être retrouvé. Rien n’arrive par hasard messieurs dames !

S’ensuit un long réquisitoire contre la publicité, milieu dans lequel il a travaillé et dont il connaît toutes les ficelles utilisées pour manipuler le téléspectateur (ah tiens ça expliquerait pourquoi il les utilise si bien dans ses films ?). La publicité qui n’est là que pour nous vendre un produit et qui ne s’intéresse pas du tout à la spiritualité (oui en même temps c’est un peu le concept hein).

On arrive sur la plus grosse partie de la conférence, pendant un temps infini Patrice va nous parler des insectes qui sont si doués pour se camoufler, des bactéries qui font des trucs hallucinants, de la nature qui est si extraordinaire que c’est vraiment trop étrange. De longues minutes interminables à s’extasier sur la perfection de la nature. Tout est tellement si bien réglé, que cela ne peut pas être le fruit du hasard. Non, tout cela échappe clairement à la théorie de l’évolution. Il y a forcément un plan derrière tout ça, un concepteur. Ça ne peut pas être le hasard qu’on vous dit. Il y a forcément une intelligence créatrice qui donne un sens à tout ça.

La suite est encore plus imbuvable tant ça part dans tous les sens sans la moindre cohérence. On peut néanmoins extraire quelques idées assénées par Patrice : l’ultralibéralisme est une religion qui dirige le monde et qui fait tout pour nous manipuler, pour nous empêcher de sortir de notre « caverne ». L’industrie agroalimentaire trafique la réalité pour nous faire consommer toujours plus de produits. Pour lui, nous serions tous des croyants, la science elle-même étant une croyance, et la théorie de l’évolution pouvant donc être remise en cause comme on remet en cause les religions. Rejeter les idées de Patrice Pouillard au nom de la science, c’est être dans la croyance. On n’est pas sortis de l’auberge.

Si pour lui il n’y a pas de grand complot global, il y a par contre tout un tas de complots plus localisés, organisés par les grandes sociétés, des groupes d’individus, des gouvernements. Et les attaques contre ses films seraient, évidemment, l’œuvre de méchants comploteurs de l’ombre que ses idées dérangent tant.

Plus on avance dans la conférence, et plus c’est le bordel. Ça nous parle de chamanes dont il faudrait écouter les sages paroles et ne pas rejeter les affirmations sous le seul prétexte qu’il n’y a pas de preuves (oui parfois croire aveuglément c’est bien, quand ça va dans le sens des idées défendues par Patrice). Il faut s’intéresser aux états modifiés de conscience, chercher à atteindre son moi profond, et toutes sortes de sornettes new age. Patrice reprend également des âneries que Jacques Grimault prononçait dans ses conférences : les histoires de polarité entre les hommes et les femmes, l’Homme et les arbres, etc. Il évoque également le nombre d’or, présent partout dans l’univers. L’idée que nos pensées influencent directement la matière est également de nouveau évoquée.

Il est aussi question du film Matrix, et du fait incroyable que le passeport de Neo expire le 11 septembre 2001. Est-ce que le scénariste savait pour les attentats ? Est-ce qu’il y a une boucle temporelle dans laquelle passé et futur se confondent ? En tout cas c’est troublant.

Mais où veut-il en venir me direz-vous ? Eh bien rien dans ce monde n’est le fruit du hasard, l’univers est une horloge savamment réglée, chaque chose a été planifiée par un architecte suprême à l’origine de tout. L’Univers possède une supra-conscience à laquelle chacune de nos consciences est liée.

Vers la toute fin de cette conférence imbuvable, enfin il est question d’archéologie avec la présentation des scans 3D des grottes de Barabar. Et figurez-vous que grâce à cette technologie, Patrice Pouillard et son équipe ont remarqué quelque chose qu’absolument aucun scientifique au monde n’avait jamais remarqué auparavant. Un fait absolument extraordinaire qui remet en cause tout ce que nous pensions savoir. Un élément incroyable qui va bouleverser toute l’archéologie. Je sens que vous êtes impatients de savoir de quoi il s’agit. Eh bien croyez-le ou non, mais les grottes ont été construites de façon symétrique ! Oui ! Ça vous en bouche un coin hein ? Parce que moi perso je n’ai jamais vu la moindre symétrie dans aucune pièce d’aucun monument. Ceux que je connais ils sont tous complètement de traviole. De la symétrie bordel, rendez-vous compte !

Voilà voilà, c’est tout ce qu’on apprendra (ou pas) sur les grottes de Barabar. Nous voilà bien avancés.

La conférence se conclut par une énième tirade sur la perfection trop étrange de la nature, que ça peut pas être le hasard, qu’il y a forcément « quelqu’un » à l’ouvrage derrière tout ça.

Il y a pourtant bien plus extraordinaire que les miracles de la Nature : tenir trois heures à écouter Patrice Pouillard nous raconter ses inepties sans se jeter par la fenêtre.


Avis de Rationnel Itude :

Moi qui suis assez réceptif aux messages sous-jacents, je peux vous dire que j’ai pris cher lorsque j’ai regardé la première partie de la conférence de Patrice Pouillard.

Cette vidéo me met mal, elle me culpabilise beaucoup en me faisant porter une part de responsabilité sur ce qu’est le monde aujourd’hui.
Culpabilisation aussi sur le fait que je ne m’interrogerais pas assez, car je serais formaté.

Il nous explique avoir beaucoup travaillé pour des publicités, et passe une partie de cette conférence en nous montrant comment les marques suscitent les besoins à travers les spots publicitaires. Donc, pour ma part, et vu qu’il est expérimenté selon lui, ce que je ressens de sa conférence est probablement recherché.

Au début, il nous parle beaucoup de lui, en soi, rien de dérangeant à cela, il nous explique comment il a appris la résilience (avec l’histoire de son blouson perdu, puis retrouvé lorsqu’il a accepté l’idée de l’avoir perdu). Déjà à ce moment, la sensation qui s’en dégage est que lui a réussi à se défaire de son matérialisme, chose que nous autres, serions bien en peine de faire.

Il nous parlera beaucoup aussi de l’allégorie de la caverne (de Platon). On se demande où il veut en venir, mais en bon publicitaire, il instille les prémisses et la conclusion s’imposera à nous après... bien après. En réalité, après avoir expliqué qu’il fait du doute méthodique, comme en science, et pas du doute systématique, comme les scientistes qui le contredisent, on comprend très vite qu’il se positionne comme cette personne qui est sortie de la caverne et qui est dénigrée par ceux qui sont restés enfermés. D’ailleurs il n’hésite pas à rappeler que ceux qui restent enfermés (dans leurs dogmes, dans leurs croyances) sont ses contradicteurs. Drôle de manière de vouloir faire de la science en attaquant de manière préventive toute contradiction.

S’ensuivra alors, pendant longtemps, très longtemps, trop longtemps, un empilement d’exemples biologiques sur lesquels il « s’interroge » - comment tout cela est-il possible ? Pour bien comprendre, il faut écouter sa définition de l’évolution. Combien de cerfs sans pattes avons-nous vus sur les bords des routes ? Aucun... car les principes de l’évolution consistent en gros à garder les mutations favorables. On pourrait donc se demander pourquoi les cerfs ont quatre pattes.
C’est ça, le fameux doute méthodique de M. Pouillard. Pour moi, ça ressemble surtout à du doute systématique.

Personnellement, je comprends surtout, et il le dit lui-même, qu’il pense plutôt que l’évolution est en réalité une volonté.
Volonté de qui ? Pas d’un Dieu, il dit ne pas y croire. Alors, que reste t-il ? Une volonté supérieure car toute l’évolution serait codée dans l’ADN, et généralement, ses propos sont alimentés par des images d’étoiles, de cosmos. Alors il ne le dit pas, mais entre l’élimination de l’hypothèse d’un Dieu créateur, la possibilité d’une volonté extérieure et supérieure et les images cosmiques, on fait une association simple...

Si je devais résumer en une phrase cette première partie, M. Pouillard s’est élevé d’un point de vue conscience, sa « méthode » lui permet de se poser les bonnes questions pense-t-il, s’interrogeant sur le sens profond de la vie, et à l’image du personnage de la caverne de Platon, il revient vers ses homologues restés dans la caverne, qui eux demeurent enfermés dans leur caverne, ou plutôt leurs croyances, leurs dogmes. Tout contradicteur est alors un de ceux restés dans la caverne, qui luttent contre l’évolution spirituelle nécessaire pour un monde meilleur - je ne lui reprocherai pas cette quête, en revanche la volonté de discréditer tout contradicteur comme il le fait, me pose un réel problème pour quelqu’un qui se dit ouvert.


Avis de Laurent Tlacuilo

Platitudes souterraines

Quatre personnes, en tout et pour tout : c’est tout ce qu’aura à offrir le générique minimaliste en clôture des plus de trois heures de monologue de Patrice Pooyard pour ce film à la location, Perception – de la caverne de Platon aux chambres sonores de Barabar.
La première personne y est remerciée, le second est crédité pour l’image et le son, et le troisième y figure comme assistant de production. Le dernier quant à lui fait humblement le choix de ne pas même apparaître – c’est normal après tout, il vient de nous raconter sa vie et d’assurer en non-stop (du moins au montage) le centre du spectacle, puisqu’il s’agit du réalisateur Patrice Pooyard.

Sa promesse ? A priori, nous parler de philosophie grecque pour nous conduire ensuite jusqu’à ses dernières découvertes dans des grottes du nord-est de l’Inde, là où semblait buter son dernier film de pseudo-archéologie, Bâtisseurs de l’Ancien Monde.

C’est avec ce maigre postulat que quelques-uns, nous avons écouté, une fois de plus, Patrice Pooyard dans ses hypothèses.

Un exercice inutile pourrait nous répondre Patrice Pooyard (et son public avec). Il semblait d’avance convenu que nous ne serions pas d’accord avec lui, comme nous avions été en opposition à ses films précédents, ses méthodes de travail et ses prises de position. Sans surprise, nous n’avons pas été d’accord.

Pourquoi alors prendre le temps d’en parler, une fois de plus ? Parce que si j’ai parlé de La Révélation des Pyramides au moment où ce film faisait son chemin sur la toile et se voyait érigé comme une référence, c’est parce que ce film énonçait des contre-vérités, mentait, niait l’histoire. Parce qu’il était potentiellement dangereux. Aujourd’hui, avec la nouvelle mouture des réflexions de Patrice Pooyard, le problème n’a pas changé.

Tu ne comprends pas […] que nous commençons par raconter des histoires aux enfants ? Ce faisant, il ne s’agit en quelque sorte, pour le dire d’un trait, que d’un discours faux, même s’il s’y trouve du vrai.

Perception est donc une conférence enregistrée à Paris le 15 septembre 2021, face à un public bien silencieux – y a-t-il seulement quelqu’un dans la salle ? On n’y voit personne hormis un bonhomme qui vient s’assurer d’un clap de synchronisation dans les premières secondes.

Patrice Pooyard y parle en fait d’abord de lui. C’est un recours narratif classique : c’est comme cela qu’il faisait raconter LRDP à la première personne par sa compagne. C’est un moyen commun de créer une empathie avec le spectateur, ou de lui partager une expérience ou un évènement qui sert d’amorce à une réflexion – un adepte de cette technique, quand il ne réfléchit pas au réchauffement climatique à travers le multivers des bulles de savon de son bain, c’est Michel Onfray, qui ouvre ses livres sur des anecdotes personnelles.
Ici, une photo au sourire béat de Patrice Pooyard est projetée, les notes musicales répétées et tendues des films de Pooyard résonnent : « Bon, là c’est moi à 20 ans, quand je croyais tout savoir… »

Trois heures pour une large part introspectives, où mes attentes sont déçues. De vestiges historiques, il est à peine question une quinzaine de minutes, presque exclusivement pour répéter des choses déjà dites, et de la caverne de Platon un peu moins de temps encore.

Dans ce récit narratif nombriliste, où son expérience propre sert de référence au tout, un blouson perdu tient autant de place que quelques pages de La République de Platon. Sauf que le blouson ne figurait pas dans le titre, lui.

Ce qui me frappe au visionnage, alors qu’il revient sur son parcours, sur ses films, sur les conflits, et surtout sur des réflexions personnelles teintées de new age, c’est la façon dont Patrice Pooyard parle. Habitué à répondre à des interviews, le réalisateur n’était pas coutumier des conférences en solo, et ici plus qu’auparavant, il soliloque et mélange sans fil directeur tout un tas d’éléments. Le discours tient d’une traite, et à défaut d’une logique précise, il ne laisse pas de place à des hésitations. C’est un texte écrit, dépourvu d’improvisation. Une prétendue démonstration qui débute sur une introspection et tient pour beaucoup du développement personnel, avec une sorte de visée universelle ; un appel à repenser notre rapport à l’histoire, au monde, à l’humanité.

Socrate, buste romain du Ier siècle – Wikipédia

Ce qu’on doit à un ennemi, je pense, en tout cas ce qu’un ennemi doit à son ennemi, c’est ce qui lui convient : du mal.

Plus prosaïquement, Pooyard revient à nouveau sur ce qui a conduit à la réalisation du documentaire de pseudo-archéologie LRDP. A commencer par sa rencontre avec Jacques Grimault, en 1999 dit-il.

Et d’embrayer sur le premier raté de parcours, l’accrochage quelques années plus tard avec le producteur principal du film : « En 2008, […] tout explose, tout s’arrête, tout se fige, je ne vois pas bien sur le moment qu’ils se servent de mon film pour se taper dessus – mais, moi, je suis vraiment dans le film, et je me range à ce moment-là du côté de l’informateur parce que j’ai l’impression que, sans lui, je ne vais rien pouvoir faire ».

Tel qu’il décrit le conflit entre son producteur et celui dont les travaux sont à l’origine de LRDP, Patrice Pooyard en est d’abord un témoin extérieur. Pourtant, jusqu’à leur différend, Pooyard n’a jamais retenu Grimault dans ses éructations récurrentes contre le producteur.
D’ailleurs, comme à l’époque où, avec Jacques Grimault, ils évoquaient leurs oppositions avec le producteur principal du film renommé pour la peine « le Gollum », les ennemis sont désormais anonymes. Et Jacques Grimault en est devenu un. Dorénavant, le voilà cantonné uniquement à ce que le récit de LRDP a fait de lui : « l’informateur ». Jamais son nom n’est prononcé au cours de la conférence Perception.

Un peu plus loin, la rupture entre le maître et le disciple, tels qu’ils étaient présentés l’un et l’autre dans la narration de LRDP, est à son tour évoquée. A ce moment-là, LRDP a connu son succès principalement sur internet, avec en prime une diffusion à l’étranger, et les deux hommes ont financé une suite pour laquelle deux financements participatifs ont permis de récolter près de 190 000 euros. C’est en 2016 et, raconte Pooyard, « en plein tournage, dans le premier tournage, je me rends compte que l’informateur nous livre une facette de sa personnalité, pour ne pas dire une personnalité, qui est totalement à l’opposé de la philosophie qu’il prône ».

Et d’ajouter, « à l’été 2016, là je m’aperçois qu’il s’est servi de moi pour être dans la lumière, je découvre ses mensonges, ses manipulations, ses propos opposés ou différents de tout ce que dit LRDP, ses conférences sur des sujets qui n’ont rien à voir avec le travail effectué dans LRDP, ses dérapages volontaires, là c’est vraiment une douche glacée. »

Cette prise de conscience subite et l’opposition qui en découle trouvent leur paroxysme en septembre 2016. 17 ans après leur première rencontre. Pendant 17 ans, Patrice Pooyard ne semble donc pas avoir questionné Jacques Grimault et ses théories, ni la vision du monde de celui-ci. Aveugle – ou simplement, croyant ? Idiot utile du directeur de La Nouvelle Atlantide ?

Pooyard en fait lui-même l’aveu : après la scission, « je reprends tout depuis le début. Je reprends tout, et je vérifie – tous les éléments. »

En septembre 2016, Pooyard évoquait ces oppositions et dévoilait le gouffre qui allait désormais se creuser entre lui et son ancien mentor au micro de Bruno Bellanca, en présence d’une personne qui participerait régulièrement à la promotion du futur BAM, Adrien Moisson.

Chose frappante : à aucun moment dans sa conférence Perception, pas plus que le premier producteur, pas plus que Grimault, les soutiens ultérieurs ne seront nommément cités.

Autre problème : si, suite à la rupture entre Grimault et Pooyard, ce dernier a comme il le dit vérifié tous les éléments, à aucun moment, jamais, il n’a précisé quels éléments étaient validés et quels éléments étaient désormais caduques. Où s’arrêtent les révélations de Grimault, où commencent les intuitions de Pooyard ? C’est le sempiternel problème posé lorsque l’un répète « c’est mon film », et l’autre « c’est mon livre ».

Le livre, d’ailleurs, La révélation des pyramides, finalement paru en 2017, crédité comme source au film éponyme (celui-ci pourtant antérieur !) était déjà problématique à ce moment-là. Et ce soir de septembre 2016, lors du live auquel assistait plus de 1000 personnes, Pooyard le premier était dans l’incapacité de répondre à Bruno Bellanca qui, après lui avoir demandé de confirmer que le livre existait bel et bien – ce que le réalisateur validait – lui demandait pourquoi il n’était pas édité ? « Je ne sais pas. »

A ce moment-là, en septembre 2016, le film que lui-même avait réalisé d’après un livre indisponible existait depuis plus de trois ans et demi.

Reconnais le point suivant : il est plus facile d’interroger que de répondre.

Au-delà de son récit du processus qui l’amène à faire LRDP puis BAM, le réalisateur évoque également les réactions suscitées par ses films. Ainsi, il parle de l’état d’esprit candide avec lequel il voit le film LRDP diffusé : « j’avais pas vraiment réfléchi aux conséquences de ce film. Je pensais que la raison l’emporterait. »

Mais La Révélation fait réagir, et pas de la façon dont Pooyard l’espérait, et tel qu’il se représente lui-même : comme le porteur de questions et d’éléments susceptibles de mettre en branle nos convictions les plus profondes, de questionner notre propre représentation du passé. Bam, patatras, c’est l’inverse qui se produit : il y a une levée de boucliers contre son film, contre les éléments qu’il affirme, contre la théorie qu’il érige.

Cette réaction débute très tôt, dès les premiers mois, en pleine ébullition autour du film. Le phénomène LRDP prend rapidement de l’ampleur au début de l’année 2013. A l’époque, au moins trois amis m’en parlent : « tu es historien, ça devrait t’intéresser ». Je croise LRDP mentionné sur les réseaux sociaux, sur des forums, et je vois le film sur YouTube. Très vite, je suis excédé par le montage, les détours, les mensonges.

Mais le premier à critiquer violemment le pseudo-documentaire et à s’en moquer allègrement, c’est le site Nioutaik. Fin février 2013, un article est consacré au film qualifié de « documentaire en mousse ». Au cours des semaines qui suivent, des milliers de commentaires se déchaînent, décortiquant ici telle affirmation du film, s’écharpant là avec un autre commentateur, réagissant à l’article, répertoriant d’autres critiques.

A ce moment-là, Nioutaik est le pionnier de la critique de LRDP, et va tenir un rôle fédérateur, à la fois par son article (quelqu’un s’est offusqué de LRDP !) et par les réactions qu’il suscite (il n’est pas le seul !). Du coup, d’autres ont suivi. Une semaine plus tard, début mars, c’était à mon tour de publier une critique de LRDP, et c’était également le cas ici-même, sur le site d’Irna.

Ce mouvement critique de la production de Grimault et Pooyard n’a depuis cessé de grossir, même si l’intérêt pour leurs théories alternatives n’est jamais parvenu à retrouver le panache qu’il a connu jusqu’en 2016 environ, avant même leur divorce. Cela notamment grâce à l’émission de La Tronche en Biais où Jacques Grimault s’illustrait avec des noms d’animaux, « rat-taupe nu » et « tardigrade », et son incapacité à démontrer la validité de ce qu’il avançait.

Autre élément révélateur : si plusieurs personnes attirées par les théories de LRDP, des « croyants » pour certains, ont depuis réalisé la supercherie et se sont éloignées voire ont critiqué à leur tour les réflexions de Grimault et Pooyard, à ma connaissance, strictement personne n’a fait le chemin inverse.

En guise de la révélation promise, il n’y aura eu que des prises de conscience de la truanderie.

Aujourd’hui, malgré les multiples critiques adressées à La Révélation, Patrice Pooyard persiste à ne pas comprendre, à ne pas vouloir comprendre. Pour lui, son travail est valide, reste valide.

Si LRDP a été rejeté, ce n’est pas qu’il se trompe, c’est que nous ne sommes pas prêts à admettre qu’il a raison – et d’en appeler une première fois à la caverne (tout de même, elle n’est pas dans le titre de la conférence pour rien !) : « On a eu le sentiment avec ce sujet de heurter une frontière invisible de notre société, un des bords de la caverne. Cette idée est trop pour notre société ».

Trop ?

…trop.

Et moi alors, et nous, les esprits malveillants qui le critiquons ? Des « scientistes […] des gens avec une forme d’intégrisme qui s’apparente à un intégrisme religieux. C’est la même manière de défendre la science. Ils doutent de tout, sauf de leur opinion. »

Et Pooyard d’en appeler à un argument que l’on pensait disparu depuis longtemps : eux, en faisant leur film, ils ont visité les sites dont son film parle. Pas leurs critiques.

Mais au-delà du fait que, pourtant, oui, certains d’entre nous, nous avons bien parcouru les tunnels de Khéops, l’étendue d’Angkor ou les vestiges de Teotihuacan, ses passages à lui sur les sites mentionnés tiennent plus de la balade touristique, ou de la collection d’images, comme Fehmi Krasniqi qui continuellement demande des images pour pouvoir parler de « preuves ». Pooyard suit le même raisonnement. Cela, la chaîne Passé Recomposé par exemple l’a régulièrement démontré en comparant des réflexions de Pooyard à des constatations scientifiques ou documentaires qui le contredisaient. Par exemple, dans une vidéo sur les « clous » de la pyramide.

Enfin, revenant sur les critiques dans son exposé de trois heures, Pooyard projette le bandeau d’un article de Paul Conge, et s’énerve : « voilà, on y parle de terreau de l’extrême droite. Ben voyons ! »

Mais, quoi ? Pooyard, durant 17 ans, n’avait aucune idée des « dérapages volontaires » de son acolyte ? aucun indice sur son antisémitisme latent (qui sera dénoncé notamment par Paul Conge justement) ? aucun doute quand son inspirateur/scénariste/informateur traitait les uns de « crème d’anus », les autres de « talmudistes » – qui est déjà un peu plus orienté – ?
Il ne s’est donc pas interrogé sur la conférence de Grimault au théâtre de la Main d’Or, à l’invitation d’Égalité et Réconciliation, en mai 2015 ? sur cette autre conférence en 2016 à l’initiative de l’association Culture Populaire, également proche d’Alain Soral ? ni même sur la présence de son propre film sur le site Quenel+, plateforme où sont notamment diffusées les vidéos de Dieudonné ?

Et lorsqu’il s’offusque de ce qu’on trouve son travail complotiste, lui qui est l’assembleur final des films, n’est-il pas capable de voir qu’il ne fait que produire finalement une « contamination entre l’univers de la fiction […] et celui de la réalité » - pour reprendre Didier Desormeaux et Jérôme Grondeux – « c’est cela qui ouvre au complotisme une porte d’entrée dans la culture adolescente et dans la culture de masse qui se veut distrayante. C’est aussi parce qu’il parle à notre imaginaire que le complotisme est séduisant. Il donne un récit du monde plus encore qu’une explication ; il est une mise en intrigue de la réalité en lui adjoignant une réalité occulte ».

Au-delà de cet aspect polémique problématique, Pooyard se veut toutefois rassurant à l’égard du monde scientifique. Lorsqu’il évoque les mesures des grottes de Barabar par exemple : « les études qu’on a financées, on les a financées nous-mêmes, avec nos fonds, c’est des études qu’on va donner, et qu’on va mettre à disposition de la science. »

Alors qu’un certain nombre de chercheurs, de journalistes et de vulgarisateurs critiquent justement l’aspect scientifique faussé, les assertions mensongères de son film, ce geste paraît surprenant. Prudence néanmoins : depuis 2013, alors que de nombreuses critiques ont souligné le montage potentiellement biaisé de LRDP et le fait d’avoir délibérément ignoré certaines remarques d’intervenants, il avait été promis à de multiples reprises que l’ensemble des rushes seraient disponibles sous peu.

Grimault et Pooyard nous assuraient que les propos de Jean-Pierre Adam en particulier étaient aussi incohérents et vides que les quelques secondes conservées dans le film nous le montraient, focalisant sur la « brosse à dents » et le « tabouret ». A ce jour, Pooyard n’a toujours pas montré le moindre extrait des rencontres avec Jean-Pierre Adam. Tout laisse à penser que ce dernier n’a servi que d’épouvantail, au même titre que Ieoh Ming Pei et l’entrevue écourtée.

Information volontairement erronée et partielle à l’époque de LRDP ? En tout cas, promesses non tenues de documents annexes au film : « vous verrez ». Huit ans plus tard, toujours rien. Et pour ces nouvelles promesses alors ? Le suspense est de mise.

Jean-Pierre Adam sur la chaîne Passé Recomposé – YouTube

Un imposteur ne participera jamais à une philosophie véritable.

Dans Perception, après pratiquement trente minutes, Patrice Pooyard évoque donc l’allégorie de la caverne de Platon, à la suite de son anecdote du blouson perdu et retrouvé.
Il la résume assez correctement : des hommes sont attachés au fond d’une grotte et voient face à eux des ballets d’ombre. Derrière eux, invisibles du fait de leurs liens, c’est un feu en réalité qui projette ces ombres, celles d’autres hommes et des objets qu’ils transportent. Par instant des bribes de discussion parviennent jusqu’aux prisonniers. Et d’évoquer ce qu’il en serait si la liberté était offerte à l’un d’eux. Comment il verrait cet autre monde, le temps qu’il lui faudrait à s’acclimater pour voir la lumière de face, pour comprendre ce qui se trouvait réellement derrière ces ombres.

…Et ce qu’il adviendrait si cet homme revenait, après avoir vu de ses yeux la réalité du monde et compris ce qui se cachait derrière ces silhouettes, pour en faire part aux autres restés entravés.

Et Pooyard de conclure alors : « Les prisonniers, sans savoir qu’ils sont prisonniers, finissent par le tuer. »

Et c’est là que l’inexactitude refait des siennes.

Les hommes ligotés au fond de la caverne, à défaut de se plaindre de leur condition, semblent conscients qu’ils sont attachés. Du moins au cours de sa discussion avec Glaucon, Socrate ne fait pas état de cet aspect. Par contre, il conclut son allégorie : « celui qui entreprendrait de les détacher et de les conduire en haut, s’ils avaient le pouvoir de s’emparer de lui de quelque façon et de le tuer, ne le tueraient-ils pas ? »

Le sens de la caverne, tel qu’il est pensé et décrit à l’origine, n’est pas celui que Pooyard raconte.

Chez Platon, par la voix de Socrate, c’est seulement s’il en vient à vouloir libérer ses pairs que l’homme serait probablement tué. Pas simplement en leur faisant part de ce qu’il a découvert. En l’état, ses pairs se contentent de le railler : « ne serait-il pas l’objet de moqueries et ne dirait-on pas de lui : "comme il a gravi le chemin qui mène là-haut, il revient les yeux ruinés", et encore : "cela ne vaut même pas la peine d’essayer d’aller là-haut ?" »

Alors, sempiternellement, c’est le même écueil, déjà si souvent reproché à Pooyard. Pooyard ne connaît pas ce qu’il cite. De la même façon qu’il ne contextualise jamais les monuments et les sites archéologiques mentionnés dans ses films, il ne contextualise pas plus les citations, ou cette allégorie qui donne son nom à la conférence.

Il n’a probablement pas lu Platon.

Tout du moins, comme les éternels alternatifs et pseudo-archéologues parlent de l’Atlantide sans rappeler que c’est uniquement Platon (toujours lui) qui en est le maître d’œuvre à travers ses textes de Timée et Critias, Pooyard ne rappelle pas que l’allégorie de la caverne figure dans les premières pages du Livre VII de La République.

Il ne rappelle pas que la caverne s’inscrit donc dans le contexte d’une œuvre magistrale, le plus long texte de Platon avec Les lois. Rapportée à l’ensemble des dix livres de La République, l’allégorie de la caverne couvre 1% de son contenu.

Et de la même façon, la conférence foisonne de citations, hors de tout contexte. Au mieux le réalisateur engage-t-il à de rares reprises son public à lire un ouvrage, et le reste du temps semble plutôt dérouler un best of pioché sur Evene ou DicoCitations.

En tout cas, il faut attendre plusieurs heures pour en revenir enfin à la caverne : « si on y réfléchit, on vit complètement en dehors de la réalité, dans la caverne de l’illusion de la consommation, de la surconsommation. On est tous enchaînés par le confort, on n’a pas le droit de regarder derrière nous. On passe notre temps à compter inutilement les ombres, ou même à nous disputer sur la manière de compter les ombres, au lieu de vivre pleinement nos existences, en harmonie avec la nature et la vie. Ce qui apparaît vital de réaliser. Le plus tôt sera le mieux. »

Voilà Platon transformé en coach de vie, Socrate arrangé à la sauce d’accords toltèques.

David, La mort de Socrate - Wikipédia

Le plus a rapport au moins, et […] le double a rapport à la moitié, et ainsi de tous les rapports de ce genre.

Enfin, parmi d’autres, quelques considérations de Pooyard m’ont fait réagir au cours du visionnage de Perception – de la caverne de Platon aux chambres sonores de Barabar.
En plus d’une lecture ésotérique de Matrix que mentionne plus haut Gollum Illuminati, des propos que le réalisateur avait déjà tenus il y a plus d’un an de cela, celui-ci récidive avec sa lecture alternative d’Astérix.

Quelle déception ! cela démontre que si nous vérifions ce qu’il dit, l’inverse n’est pas vrai, il ne lit pas nos critiques. Sans quoi il n’aurait pas affirmé qu’Astérix est le seul Gaulois dont le casque est pourvu d’ailes, oubliant encore une fois le chef Abraracourcix ! Par Toutatis !

Et ailleurs, cette sortie : « on est tout autant capable de respirer à 8 000 m d’altitude qu’à -80m de profondeur dans les océans parce qu’on est le seul mammifère terrestre dont les poumons ne s’écrasent pas à cette profondeur ».

Là encore, Patrice Pooyard démontre une double ignorance.

Le problème posé n’est pas un problème pulmonaire. C’est d’abord une question de pression et d’oxygène. Au niveau de la mer, la pression est de 1 Bar (cette valeur est employée par commodité, très précisément, elle est de 101 325 pascals). A ce niveau, la concentration en oxygène dans l’air est de 20,9%.

Par conséquent, la pression partielle d’oxygène avoisine 212 000 pascals. Cette pression, avec l’altitude, diminue de façon exponentielle. A une altitude de 5 000 mètres, sa valeur a diminué de moitié.

Plus on monte haut, plus le corps doit s’adapter : le rythme cardiaque s’accélère afin de produire plus de globules rouges pour compenser ce manque, la digestion est ralentie, la respiration s’intensifie.

Les spécialistes de l’alpinisme ne sont pas d’accord sur une hauteur spécifique, mais ils situent entre 7 500 et 7 800 mètres et au-delà une zone dite « zone de mort ». A cette altitude, les risques liés à la diminution de la pression partielle d’oxygène empêchent de s’attarder au-delà de quelques heures. Si l’Everest (8 849m) a été atteint à plusieurs reprises sans avoir recours à de l’oxygène en bouteille, s’attarder à de telles hauteurs plus de quelques heures conduirait à y rester pour de bon.

Tandis que la pression atmosphérique décroît de 0,1 Bar par tranche de 1 000 mètres d’altitude, lorsque l’on s’enfonce dans l’eau, la pression augmente. De façon fulgurante en comparaison : à chaque dizaine de mètres, c’est un Bar qui s’ajoute.

Ainsi, à seulement 10 mètres de profondeur, la pression est multipliée par deux – là où il faut s’élever de 5 000 mètres pour la diviser par deux !

Au-delà de toutes les questions liées au fait de descendre à une certaine profondeur, puis de revenir à la surface et tout ce que cela implique (et la raison d’être des paliers de décompression en particulier), à partir d’une certaine profondeur, le principal risque, c’est la narcose.

Celle-ci est généralement susceptible d’intervenir à partir de 30 mètres de profondeur (4 Bar), et c’est l’azote (qui compose 78,1% de l’air) qui en est la cause. Le système nerveux est impacté et, selon les cas, les muscles se raidissent, ou la personne ressent une altération de son état, comme si elle était par exemple sous l’effet de l’alcool, d’où l’autre nom de la narcose : « ivresse des profondeurs ».

Il est considéré qu’au-delà de 60 mètres, les risques sont incontrôlables.

Au passage, si l’azote est toxique pour le corps au-delà de 60 mètres, l’oxygène devient à son tour toxique seulement 6 mètres plus bas.

Toutefois, en changeant la composition du gaz respiré, ou en plongeant en apnée, ces limites sont parfaitement dépassables : ainsi, le record de profondeur en apnée est à -117m, en plongée autonome à -332m. Mais dans ces conditions, cela ne répond plus à ce qui est énoncé par le réalisateur durant sa conférence, puisqu’il n’est alors plus question de respirer de l’air, ou de respirer tout court.

Par conséquent, lorsque Patrice Pooyard fait respirer sans difficulté un être humain à 8 000 ou à -80 mètres, il nous entraîne à une mort assurée.

Plongée – LT

[Il] avait dans l’idée de s’en aller, lui qui, comme un maître de bains, avait inondé nos oreilles du flot torrentiel de son discours.

En regardant Perception, au-delà des problèmes récurrents de méthode, de récit, de démarche qui ont été posés depuis LRDP et qui n’ont toujours pas été résolus, ce qui pose en prime problème, c’est que désormais Patrice Pooyard tient un discours où il se présente comme détenteur d’une vérité, ou a minima guide vers celle-ci.

Pooyard fait désormais du Grimault.

Il veut nous éclairer de ses découvertes, nous conduire à une harmonie avec le monde. Ce chemin, nos supposés prédécesseurs, les fameux bâtisseurs de l’ancien monde – des humains évolués tout droit sortis d’un roman de René Barjavel ou de Bernard Werber – nous en auraient disséminé des indices cachés dans des bâtiments antiques afin nous y amener. « Le plus tôt sera le mieux ».

L’inquiétant, c’est qu’en suggérant un parcours, une vérité à atteindre, un récit initiatique dont Pooyard serait le détenteur, il provoque une gouroufication de son public.

Pendant ce temps, la page de BAM propose des voyages en Egypte pensés avec l’alternatif Planète RAW, et son assistant de production démarche des YouTubeurs, afin de tenter d’assurer un peu de publicité.

L’harmonie, cela ne s’obtient pas sans frais.

La réponse de Nota Bene tenait en deux lignes : « MDR Y’a pas moyen. »

Nota Bene évoque ses mails – Twitter

En présence des personnes sages et amis, dire la vérité, du moins ce qu’on en sait, au sujet des questions les plus importantes qui nous sont chères, constitue une entreprise sans risque et rassurante, mais si on présente des arguments alors qu’on est perplexe et dans un état de recherche, ce que précisément je fais, c’est quelque chose d’effrayant et qui peut déraper. Non que cela prête à rire, ce serait puéril, mais de peur que, si je faillis à la vérité, ce ne sera pas seulement moi-même qui déraperai, mais aussi les amis que je me trouverai à entraîner sur toutes ces questions au sujet desquelles il convient de déraper le moins possible.

Platon, La République - traduction de Georges Leroux
(ainsi que toutes les précédentes citations en exergue)

Laurent Tlacuilo – Octobre 2021

Sources :

Nioutaik – “La Révélation des Pyramides”, le documentaire en mousse :
http://nioutaik.fr/index.php?post/2013/02/26/640-la-revelation-des-pyramides-le-documentaire-en-mousse

Passé Recomposé – Les mystérieux clous de la Grande Pyramide :
https://youtu.be/5rZ_FLM6ljQ
Interview de Jean-Pierre Adam :
https://youtu.be/YkU1ctnlN2U

Wikipédia – Zone de la mort :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Zone_de_la_mort

Didier Desormeaux et Jérôme Grondeux, Le complotisme : décrypter et agir, 2017

Alain Foret, Plongée plaisir 4, 2017

Platon, Œuvres complètes, sous la direction de Luc Brisson, 2020


Avis de Jaco Patrolman

Je ne vais pas répéter ce qu’ont dit mes prédécesseurs. Je vais faire une tentative d’analyse, qui n’implique que mon point de vue. Elle ne sera peut être pas « la vérité » sur Patrice Pooyard, mais elle est ce que, personnellement, je comprends des propos tenus par Patrice Pooyard dans cette conférence.

Tout ce que je retiens de la conférence de Patrice Pooyard, ce sont ces 2 concepts :
1°- « Faites ce que je dis, pas ce que je fais ».
2°- « Même si j’ai tort, j’ai quand même raison ».

Mais développons un peu :

1° : « Faites ce que je dis, pas ce que je fais »

Pour être un peu plus précis, le premier concept serait plutôt : « Écoutez ce que je dis, mais ne regardez pas ce que je fais » .

Dans cette conférence, dont l’accès à la captation vidéo est payante, Patrice Pooyard passe un long moment à nous expliquer que la société de consommation ainsi que la publicité, seraient « LE MAL ». Personnellement, à l’heure d’aujourd’hui, où l’on peut trouver des millions de conférences mises à disposition gratuitement sur le net, je trouve que le fait de vendre l’accès à une vidéo de conférence, participe justement à entretenir cette idée de consommation.

On remarquera aussi que la publicité, qu’il critique sévèrement dans cette conférence, ne semble pas lui poser de problème lorsqu’il en fait lui-même, pour vendre des DVDs ou livres de BAM, via FACEBOOK !

« Écoutez ce que je dis, ne regardez pas ce que je fais » ...

Une publicité FB implique de verser de l’argent à FB, pour que votre publicité soit diffusée largement sur ce réseau social. Et donner de l’argent à une multinationale comme FACEBOOK, qui utilise des données personnelles dans le but de mieux cibler les publicités, ne serait-ce pas là, justement un acte qui entretient cette société de consommation ?

On peut aussi se poser des questions quant à la chaîne Youtube de BAM, qui est un moyen de communication. Et qu’est-ce que la communication, si ce n’est de la publicité ?! On remarquera aussi, que Patrice Pooyard, dans cette conférence, arbore un magnifique sweat noir, avec écrit « BAM » en blanc au niveau du torse. Ce « BAM », c’est le logo de son film Bâtisseurs de l’Ancien Monde. Faire un logo, n’est-ce pas faire de la com ? Et l’arborer dans cette conf, n’est-ce pas faire de la pub ?

Et, dans la partie de sa conférence sur la publicité, il nous explique que celle-ci nous crée des besoins dont nous n’avons en réalité pas besoin, dans un but lucratif, ce qui n’est « PAS BIEN ». Mais du coup, que sont tous les produits dérivés vendus par Patrice Pooyard via le site de BAM ? Si ce n’est, justement, des besoins inutiles ! En vendant tout cela, il s’intègre donc totalement dans cette société de consommation, qui je le rappelle, d’après lui, serait « LE MAL ».

On peut ajouter à cela que Patrice Pooyard nous explique que le fait d’assouvir ces besoins ne serait pas quelque chose de bénéfique, bien au contraire. Du coup, si Patrice Pooyard nous crée des besoins, via des produits dérivés et autres vidéos payantes, cela serait-il dans le but de nous faire du mal ??? Voilà donc la conclusion à laquelle j’arrive si je suis la logique de Patrice Pooyard…

2° : « Même si j’ai tort, j’ai quand même raison »

Pour être un peu plus précis, ce deuxième concept serait plutôt : « Si j’ai envie de penser que j’ai raison, alors c’est que j’ai raison » .

Après tout un exposé sur « l’instinct », Patrice Pooyard nous donne une nouvelle définition du mot « intuition ». Je cite : « Peut être que c’est ça (l’instinct) qu’on appelle l’intuition en fait ?! »

Sauf que non… L’instinct est inné, il ne se base pas sur une expérience préalable. Alors que l’intuition est basée sur une expérience préalable. On a donc ici deux termes, s’appliquant à deux choses différentes, et donc, qui ont deux définitions différentes. C’est logique.

Et si on se met tous à faire comme Patrice Pooyard, à savoir, changer la définition des mots pour les faire correspondre à notre bon vouloir… bah on est pas près d’arriver à comprendre quoi que ce soit aux propos de qui que ce soit… (J’imagine la tête de ma boulangère si, la prochaine fois que j’irai acheter du pain, je lui demandais « un steak bien cuit s’il vous plaît », juste parce que, pain et steak, ça se mange donc c’est pareil… )

Le truc, c’est que Patrice Pooyard utilise une définition du mot intuition, issue du New Age. Une intuition qui ne se base pas sur l’expérience, mais qui serait une sorte de connaissance innée, issue du monde spirituel. Le milieu New Age passe son temps à redéfinir les mots pour les faire correspondre à sa vision spirituelle du monde. Exemple : « quantique » - « vibration » - « énergie » - etc… Et on peut remarquer dans cette conférence, que Patrice Pooyard plonge en permanence dans cette façon de raisonner : « si j’ai envie de penser que ce mot veut dire ça, alors c’est qu’il veut dire ça ! »

« Si j’ai envie de penser que j’ai raison, alors c’est que j’ai raison ».

À ce sujet, je pense que la partie de la conférence sur le film Matrix est intéressante : Patrice Pooyard nous dit que Matrix est une « incroyable adaptation de l’allégorie de la caverne, de Platon ». Alors, oui. même si je trouve dommage de n’attribuer à ce film « que » l’inspiration de la caverne de Platon, mais oui, c’est l’idée de base du film. Ensuite il nous explique que, pour lui, les suites (Matrix 2, et 3) auraient « totalement retourné la philosophie du (premier) film ». Son explication est que le premier film parle du fait de sortir de la caverne de Platon, pour découvrir la réalité du monde, alors que dans les suites, l’on apprend que la matrice est dans une matrice qui est dans une matrice etc… et donc que l’extérieur de la caverne n’est tout simplement qu’une autre caverne.

Patrice Pooyard pense que le premier film favoriserait « l’action, la réaction, d’aller voir au-delà des apparences, derrière la société », alors que les suites « favoriseraient l’inaction ».
Pourtant d’après sa propre explication, il semble que les suites favoriseraient l’action d’aller voir au-delà des apparences de l’au-delà des apparences. Et donc de continuer à chercher la vérité au-delà de ce que l’extérieur de la caverne voudrait nous faire croire qu’est la vérité !

Pour moi, donc, tout ce qu’il raconte n’a pas le moindre sens logique… Il me semble évident que les auteurs des films sont partis du concept de la caverne de Platon, pour en développer une réflexion. Mais Patrice Pooyard semble vouloir s’arrêter aux bases de la réflexion… Il refuse les analyses sociétales plus complexes des films 2 et 3, pour se complaire dans la vision plus simpliste du premier film. Et ce, uniquement parce que la « caverne » est un concept qui « lui parle », et qu’il ne faudrait surtout pas pousser la réflexion plus loin… Comme s’il fallait réfléchir un peu, mais pas trop…

Conclusion :
La vision des auteurs des films est mauvaise, alors que l’interprétation de Patrice Pooyard est bonne…

« Si j’ai envie de penser que j’ai raison, alors c’est que j’ai raison ».

Voilà en tout cas ce que je comprends des propos de Patrice Pooyard sur les films Matrix.

On peut aussi revenir sur l’histoire du blouson perdu puis retrouvé. Je ne vais pas revenir sur ce qu’en ont déjà dit mes prédécesseurs, mais il y a un point que j’aimerais préciser.

Pour rappel, il pense qu’à cause de ses pensées négatives, l’univers aurait « créé » le vol de son blouson, puis, grâce à des pensées positives, l’univers le lui aurait rendu. Mais ensuite il nous dit de ce type de synchronicités, que : « cela pourrait très bien être dû à un biais de confirmation », et donc pas à l’univers. Et ensuite il nous dit : « On se fiche de l’origine des synchronicités (que ce soit un biais de confirmation ou bien une volonté de l’univers), l’important c’est de regarder le résultat, et ce que ça nous fait. »

Ce que j’en comprend, c’est que la vérité (que ce soit dû à « l’univers » ou à un « biais cognitif ») n’a aucune importance, et que l’important serait de croire ce que l’on a envie de croire : « Si j’ai envie de penser que c’est l’univers, alors c’est l’univers ! »

« Si j’ai envie de penser que j’ai raison, alors c’est que j’ai raison ».

Pour conclure ce texte, voilà une citation de moi-même ( :D ) que j’utilise régulièrement :
« La vérité, elle est ce qu’elle est. Elle n’en a rien à faire de ce que l’on a envie de penser qu’elle est ! »