Compte-rendu d’examen de documents - affaire des momies de Nazca
Article mis en ligne le 25 octobre 2017

par Alain Froment, Fabrice Demeter

Après une première émission en juin 2017, où il avait invité deux anthropologues français à s’exprimer sur les momies de Nazca (voir cet article pour plus de détails), l’animateur Bob Bellanca a consacré le 18 octobre une nouvelle émission sur sa chaîne BTLV à la même affaire. Etaient invités dans cette émission deux spécialistes du Musée de l’Homme, Alain Froment (déjà présent en juin) et Fabrice Demeter. L’émission n’est malheureusement pas disponible pour les non abonnés, mais les deux anthropologues ont bien voulu me faire parvenir un rapide compte-rendu de leur examen des documents qui leur ont été transmis.

Les documents soumis par BTLV aux anthropologues du Musée de l’Homme sont constitués de nombreuses photos montrant la manipulation de petits mannequins, de photos montrant des clichés de scanner sur un négatoscope, et de fichiers Dicom (imagerie numérique médicale) présentés par l’expéditeur Thierry Jamin comme des IRM :

L’examen des fichiers Dicom visualise une forme en 3D opaque et inutilisable pouvant tout autant provenir d’une IRM que d’un scanner, mais sans aucun contraste pouvant permettre d’examiner l’intérieur du corps.

L’image est compatible avec un scan de très basse résolution tel qu’on le pratiquait il y a une trentaine d’années, avec des épaisseurs de coupe importantes mais on ne dispose d’aucune spécification technique pour l’interpréter.

Dans une vidéo que nous avons eu à commenter dans l’interview de BTLV [1], un radiologue se présentant comme ayant 35 ans d’expérience présente un os coupé (en position anatomique de l’humérus) comme une fracture, alors qu’on voit nettement un os coupé et collé au niveau du coude grâce à un amas de matière opaque. L’os a été raccourci pour avoir la même longueur que son homologue de l’autre côté. En revanche, on ne voit sur ces radios ou sur les scans ci-dessous aucune trace de masse musculaire, il s’agit d’os secs enrobés de papier ou d’une matière à identifier.

On voit également sur cette radio que les os situés en position des fémurs sont des os juvéniles (présence de cartilages de conjugaison) alors que d’autres os longs ne présentent pas ces cartilages. Il s’agit donc d’un assemblage d’os animaux provenant d’individus d’âge différent.

Enfin, la vidéo montre des images du scanner qui a été fait (mais auxquels les fichiers à notre disposition ne correspondaient pas) ; on y voit, comme sur les radios, que l’avant-bras (antebrazo) est constitué d’un seul os et non de deux comme chez les reptiles (et bien sûr les mammifères), ce qui signifie que la main était bloquée sans pouvoir effectuer des mouvements de pronation et supination. En outre, cet os de l’avant-bras n’a ni la même longueur ni la même épaisseur de corticale à droite et à gauche, ce qui signifie que ces deux os proviennent d’individus différents.

En conclusion, il semble que soit les examens ont été effectués avec des appareils de très mauvaise qualité, soit les documents communiqués sont volontairement médiocres pour empêcher une analyse précise. A ce jour, on attend toujours des images scanner de qualité correcte permettant une visite virtuelle du contenu de ces mannequins surnommés Alberto et Josefina. Malgré des demandes répétées ces scans ne nous ont pas été transmis, et on attend donc leur publication de la part de l’inventeur.

Enfin, en ce qui concerne la momie surnommée Maria, il s’agit d’une authentique momie précolombienne, dont la datation radiocarbone est correcte (1700 ans Before Present), porteuse d’une déformation crânienne typique de la région, bien visible au scanner et sur les radios, mais dont les oreilles ont été coupées et les mains et les pieds mutilés pour faire croire à une tridactylie, tandis qu’une fente palpébrale horizontale factice a été façonnée sur les orbites pour donner une allure reptilienne.

En conclusion, ces restes hétérogènes (il y a aussi des mains « géantes » où des phalanges et des métacarpiens humains ont été intercalés, parfois à l’envers, pour rallonger les doigts) sont clairement des montages fabriqués, en dehors d’une momie véritable et ancienne sur laquelle ont été pratiquées des manipulations.