Debunk express #1 - Alignement des Cathédrales
Christian Cambois
Article mis en ligne le 31 octobre 2016

par Gollum Illuminati

Peut-être avez-vous vu passer sur votre mur Facebook ces 2 schémas sur le thème des cathédrales, réalisés par un certain Christian Cambois, se revendiquant de la même méthode de travail que Howard Crowhurst (cf article précédent). Et nous allons voir que sa démonstration est effectivement tout aussi bidouillée.

Ainsi l’auteur nous présente dans un premier temps le plan au sol de la cathédrale de Rouen, et s’étonne d’y trouver un double-carré (il paraît que c’est le top les double-carrés). On pourrait d’abord se demander pourquoi avoir choisi la cathédrale de Rouen en particulier. Est-elle représentative de l’ensemble des cathédrales de France ? Visiblement non puisque point de double-carré dans d’autres cathédrales plutôt renommées :

pas de double-carré dans ces Cathédrales célèbres. Mince alors...

Revenons au plan de la cathédrale de Rouen ; avec tous ces jolis pointillés partout ça fait très complexe et sérieux (méthode classique des pseudo-scientifiques pour embrouiller le quidam du coin). Attendez une minute ! Ne remarquez-vous rien d’anormal dans la façon de délimiter le contour du bâtiment ?

je vous ai mis de jolis cercles bleus pour vous mettre sur la piste...

Pourquoi ne pas tenir compte des avancées de maçonnerie des entrées ouest, mais par contre prendre bien soin d’intégrer celles de l’entrée sud ? Comme c’est étrange, n’est-ce pas. La logique veut que soit on prend en compte toutes les protubérances du bâtiment, soit aucune. Ce faisant, le double-carré disparaît comme par enchantement... dommage.

Mais d’ailleurs, en supposant que pour une raison qui nous échappe totalement les maçonneries des entrées ouest soient effectivement à jeter à la poubelle, est-ce que pour autant on obtient réellement un double-carré comme le prétend l’auteur ? Eh bien figurez vous que... non !

Nouvelle tricherie subtile puisque tous ces jolis pointillés ne découpent pas des carrés parfaits, étant en fait basés sur le prolongement des colonnes et autres maçonneries du bâtiment. Au final on obtient des figures de tailles diverses et variées. On peut aussi aller faire un tour sur le site Structurae pour vérifier les dimensions de la cathédrale, qui sont de 136m de long sur 61m de large (14mètres en longueur de trop pour former un double-carré...).
Le plan original provient de Wikipédia. On constate que l’auteur a soigneusement gommé les diagonales afin de mieux masquer son subterfuge (avec les diagonales apparentes les différences de dimensions sont manifestes).

Évidemment, si Christian reprend les méthodes méticuleuses d’Howard, il n’est pas étonnant de tomber sur des ajustements de ce genre. Comme par exemple ici avec le sanctuaire de Baalbek par-dessus lequel Howard trace ses fameux carrés sans tenir compte le moins du monde des parties du bâtiment qui ne vont pas dans le sens de sa géométrie ancienne.

C’est beaucoup plus flagrant si l’on superpose un plan du sanctuaire.

Mais pourquoi donc s’embêter à utiliser des relevés scientifiques alors qu’avec une photo satellite de basse résolution on peut facilement faire rentrer ses carrés un peu partout et prétendre à une ultra-méga-précision indiscutable ? En général le public n’y voit que du feu, faisant naïvement confiance au sérieux de la démonstration, surtout qu’on lui promet que tout cela à un sens (que vous découvrirez peut-être si vous achetez les 12.000 livrets - et si malgré tout après ces heures de lecture vous n’avez toujours rien compris, c’est que votre esprit n’est pas encore assez ouvert et qu’il faudra compléter votre collection par les 12.000 DVD de conférences et cours de l’auteur).

Jetons maintenant un œil à cette magnifique carte de France :

tiens les Dom-Tom ont disparu de la carte. Comme c’est étrangement bizarre.

C’est déjà assez particulier de faire la démonstration d’alignements en se basant sur une carte aussi peu précise, mais avec les chercheurs de vérité on a l’habitude.

Si je comprends bien, on essaie de nous montrer ici que les édifices en question sont alignés sur des parallèles (il faut tenter de deviner puisque la légende dit seulement« des alignements surprenants »).

La carte en question est extraite de Wikipedia et présente les « Cathédrales catholiques romaines de France » (vous remarquerez comment les départements d’Outre-Mer ont soigneusement été gommés de la carte de monsieur Cambois). Elles sont normalement au nombre de 101 (une par département). A partir de 101 points, combien peut-on tracer de lignes ? 5 050 (n*(n-1)/2) . Vous voyez 5000 lignes sur cette carte vous ? Voilà ce que ça donne lorsque l’on trace toutes les lignes entre 101 points :

Ah oui tout de suite ça fait beaucoup moins mystérieux. Parmi tout ce fatras de milliers de lignes, je peux en effet choisir d’en sélectionner seulement quelques unes pour me la jouer « découvreur de message caché » :

sélection de quelques parallèles pour faire plus classe

Et vous inviter à rechercher par vous-même en quoi mes lignes sont exceptionnelles et quel message elles renferment (mais puisqu’on vous dit que c’est de la didactique !). Oui je pourrais tout à fait vous embrouiller les idées en sélectionnant soigneusement mes données pour dégager toutes sortes d’alignements plus ou moins « design ». Et sans doute que mon public n’irait pas vérifier si tout ce que je dis est juste. Certainement que personne n’ira par exemple s’assurer que les cathédrales de Quimper, Vannes et Nantes sont effectivement alignées comme le suggère ma merveilleuse carte. A part si un Troll passait par là (c’est pas bon pour les affaires les Trolls) :

6km, vous chipotez, ça reste toujours plus précis que l’équateur penché !

De toute façon même sur ma carte biaisée les tracés sont faux et personne ne le remarque alors pourquoi m’embêter à faire une étude sérieuse alors que de vulgaires lignes parallèles tracées à la va-vite suffisent à épater le chaland ?

12km, vous cherchez vraiment la petite bête. Vous n’avez pas l’esprit assez ouvert !

Des approximations, des manipulations, des alignements erronés, des choix arbitraires, des omissions volontaires, ... au final que reste-t-il de cette pseudo-démonstration ? Comme d’habitude, pas grand chose.

Qu’est-ce que tout ceci peut donc bien signifier ?...