Le syndrome de Galilée
Article mis en ligne le 6 février 2008

par Irna

Les partisans des parasciences interprètent le débat comme la lutte
d’esprits ouverts, révolutionnaires, contre la censure d’une institution omnipotente et sclérosée, qui cherche à étouffer la vérité afin d’assurer la pérennité de sa domination. Cette schématisation, qu’on appellera ici “appel à Galilée”, repose sur l’établissement d’un parallèle entre la controverse actuelle sur les parasciences et le procès de Galilée – ou plus précisément, le mythe auquel il a donné naissance.

Marianne Doury
« Le débat selon les partisans des parasciences II : L’appel à
Galilée » , Chapitre 7, Le débat immobile, L’Argumentation
dans le débat médiatique sur les parasciences
, Paris, Kimé,
pp. 143-165.

L’excellente analyse de Marianne Doury sur l’utilisation par les tenants des pseudo-sciences de "l’appel à Galilée" ou "syndrome de Galilée" (version pdf téléchargeable ici (fr)) s’applique merveilleusement bien au cas Osmanagic et aux "pyramides" de Bosnie. On retrouve en effet chez M. Osmanagic ou ses partisans les différentes variantes qu’elle identifie de cet "appel à Galilée" :

 l’appel à Galilée "présuppose la validité de la théorie défendue. L’adversaire, qui lui est opposé, est pressé [...] de changer d’opinion, et d’admettre la validité de la théorie présentée comme novatrice, sous peine d’attirer un jugement défavorable sur sa propre personne, puisqu’en rejetant la théorie, il reproduit l’anti-modèle."

 il "suggère à l’adversaire de réserver son jugement, arguant du fait qu’il appartient à l’avenir de trancher" ;

 il permet "de faire apparaître les adversaires des parasciences comme les gardiens de la tradition, attachés au passé, réfractaires à toute innovation, et, à l’inverse, de présenter les partisans des parasciences comme les représentants d’une théorie en plein développement, tournée vers l’avenir, dont la validité sera démontrée par l’histoire dans les années à venir."

 il permet également d’affirmer "la non scientificité du débat. Une des raisons fréquemment invoquées par les partisans des parasciences de l’impossibilité à résoudre le débat est l’absence d’objectivité de la part de leurs adversaires, qui rejetteraient les théories parascientifiques non parce qu’elles ne sont pas scientifiques, mais bien plutôt parce qu’elles les dérangent, d’un point de vue éthique, philosophique, ou simplement parce qu’elles mettent en danger leurs intérêts (carrières, subventions...)."

 enfin, la "dimension pathétique est très présente, à travers l’évocation des risques courus par le Galilée moderne".

"Ils ont ri de Galilée"

On retrouve chez les partisans des "pyramides" de Bosnie toute la gamme des variantes décrites ci-dessus. Ainsi, c’est M. Osmanagic lui-même qui se compare à Galilée dans une interview (en) téléphonique donnée à LiveScience en mai 2006 :

Work is slated to continue at Visoko through at least 2010, by which time Osmanagic believes the research will have vindicated his theories. Meanwhile, he isn’t worried that what he’s found does not mesh with current thinking. "We laugh at the people who said that the world was flat, and they laughed at Galileo," he said. "The history books will just have to be rewritten from scratch, that’s all."

(Il est prévu que le travail se poursuive à Visoko au moins jusqu’en 2010, et M. Osmanagic pense qu’à ce moment-là les recherches auront confirmé ses théories. En attendant, il n’est pas inquiet si ce qu’il trouve ne fait pas bon ménage avec les théories actuelles. "Nous rions des gens qui disaient que la terre était plate, et eux riaient de Galilée", dit-il. "Les livres d’histoire devront tout simplement être totalement réécrits, c’est tout".)

Je ne commenterai pas la modestie du personnage qui se compare à Galilée ; on pourra noter tout de même que M. Osmanagic connaît visiblement aussi bien l’histoire de Galilée que la préhistoire : d’une part, la question qui a valu à Galilée les ennuis que l’on connaît n’est pas du tout celle de la rotondité de la terre, guère mise en doute même pendant le Moyen-Age, mais celle de l’héliocentrisme. D’autre part, comme le note Moti Ben-Ari dans son livre Just a Theory : Exploring the Nature of Science, personne n’a jamais ri de Galilée ; "au contraire, c’est parce que ses arguments étaient si convaincants que l’Eglise les voyait comme une sérieuse menace à ses intérêts politiques et religieux" [1].

La comparaison de M. Osmanagic avec Galilée fait florès chez ses partisans, surtout quand elle est l’occasion de dénoncer les "nouveaux inquisiteurs", comme dans cette lettre (en) d’un certain "Professeur Muris Pozderac" publiée sur le site de la Fondation au moment où le ministre de la Culture Gavrilo Grahovac a refusé à M. Osmanagic l’autorisation de continuer les fouilles dans la zone protégée sur Visocica (voir ici pour cet épisode) :

Even the Inquisition could not prevent the development and the discoveries throughout our history, and these new inquisitors won’t succeed either. They may try to abuse their high-ranking positions and misuse them for their own political and nationalistic agendas, but the truth and justice always prevails.

(Même l’inquisition n’a pas pu empêcher le développement et les découvertes à travers notre histoire, et ces nouveaux inquisiteurs n’y réussiront pas non plus. Ils peuvent essayer d’user de leurs positions élevées, et d’en abuser pour leurs propres raisons politiques et nationalistes, mais la vérité et la justice prévaudront toujours.)

Les forumeurs ne sont pas en reste, ainsi d’un certain "BanKulin" [2] sur le Forum Zététique (fr) : "A l’epoque de Gallilée, Mr Osmanagic et tout ceux qui l’auraient soutenus auraient été traités d’Heretique par l’eglise et auraient finis sur un bucher" (sic). Encore un qui devrait lire un peu sur la vie de Galilée, pour éviter de le confondre avec Giordano Bruno ! Mais le bûcher n’est peut-être effectivement pas loin pour qui oserait soutenir M. Osmanagic, si l’on en croit du moins un pseudo-témoignage cité sur le forum Archaeologica (en), où un "archéologue anonyme" explique qu’il lui est impossible de soutenir ouvertement Osmanagic sous peine de "compromettre sa carrière académique" et de "risquer l’ostracisme". Et, pour enfoncer le clou, le forumeur qui cite ce témoignage évoque une "force d’inquisition archéologique" et le sort réservé par "l’establishment" aux "pères de l’astronomie Copernic et Galilée", oubliant que Copernic n’a jamais eu affaire à l’Inquisition, et que le tribunal qui a condamné Galilée était un tribunal religieux, et non scientifique.

Au cas où la mention de Galilée ne suffirait pas, les partisans des pyramides n’hésitent pas invoquer le ban et l’arrière-ban des "scientifiques incompris" et "scientifiques maudits". Ainsi, un poète évoque, dans "Le songe de Semir" (bs), l’ombre de Giordano Bruno venue assurer Semir de son soutien et de celui de Galilée. Mais les scientifiques qu’on fait le plus souvent patronner M. Osmanagic sont Nikola Tesla et Albert Einstein. Ainsi, sur le site de la Fondation (bs), "l’ingénieur diplômé Jozo Lovrinovic" dresse un parallèle entre Nikola Tesla, victime des moqueries de ses confrères scientifiques, et Semir Osmanagic, et en conclut que "l’histoire se répète". Einstein, lui, est souvent appelé à la rescousse quand est mentionnée l’absence de compétences archéologiques de M. Osmanagic, ici sur le forum bosnian-pyramid.com (en), et l’on voit ressortir la légende urbaine qui veut que le petit Albert ait été un très mauvais élève :

The man might not have a Ph’D in Archaology nor Geology. But he has studied Pyramids of latin America for 15 years. He’s self-learned.
Einstein, for example, discontinued elementary school. But he eventually become one of the biggest genious’ the world has seen !

(Cet homme n’a peut-être pas un PhD en archéologie ou géologie. Mais il a étudié les pyramides d’Amérique latine pendant 15 ans. C’est un auto-didacte. Einstein, par exemple, a quitté l’école élémentaire. Mais il est devenu ensuite un des plus grands génies que le monde ait vus !)

Il ne suffit pas d’être persécuté pour être Galilée, encore faut-il avoir raison.

(A man does not attain the status of Galileo merely because he is persecuted ; he must also be right. Stephen Jay Gould in Velikovsky in Collision (en))

Si la célèbre phrase de S. J. Gould était justifiée dans le cas de Velikovsky (fr) (encore que la "persécution" dont il fut victime ne soit pas allée beaucoup plus loin qu’un boycott de ses oeuvres et de son éditeur par une partie de la communauté scientifique), j’hésite un peu à l’appliquer au cas de M. Osmanagic. Non pas que celui-ci ait raison - il n’en a en tout cas jusqu’ici jamais apporté le moindre début d’évidence, mais plutôt que, contrairement à ce que voudraient nous faire croire ses partisans à coup de comparaisons avec Galilée et de dénonciations des "nouveaux inquisiteurs", il a plutôt jusqu’ici bénéficié d’un traitement peu courant pour un pseudo-archéologue et qui est loin de ressembler à une quelconque "persécution". Qu’on en juge plutôt :

 L’ensemble de la presse de Bosnie a fait preuve d’un soutien sans faille envers M. Osmanagic et son projet. Les principaux quotidiens populaires locaux, Dnevni Avaz, San, Oslobodenje..., reproduisent systématiquement in extenso les communiqués de sa Fondation, multiplient les enquêtes démagogiques et les titres accrocheurs, sans une once d’esprit critique. Aucun n’a publié par exemple la lettre ouverte des scientifiques bosniens à l’Unesco ou celle adressée à M. Schwartz-Schilling, représentant de l’ONU ; aucun n’a fait état des révélations apportées par le magazine BHDani sur la lamentable absence de méthodes scientifiques sur les fouilles ; les rares mentions d’une opposition au projet sont accompagnées systématiquement des démentis grandiloquents de la Fondation. Je ne sais pas si cet état de fait vient des connexions de MM. Osmanagic père et fils dans les médias, du fait que l’Agence Fédérale de Presse de Bosnie (FENA) figure parmi les sponsors de la Fondation, ou s’il est à mettre sur le compte d’une atonie générale de la presse bosnienne, toujours est-il que les journalistes font preuve d’une remarquable mansuétude envers M. Osmanagic et son équipe, évitant soigneusement toute question dérangeante (voir par exemple la vidéo de la conférence de presse donnée par les "experts égyptiens", où la seule question posée par les journalistes présents portait sur la durée du séjour de ces égyptologues). La seule exception à cette complicité générale de la presse locale avec M. Osmanagic est le magazine cité plus haut BHDani, dont les journalistes, en particulier Vuk Bacanovic, mènent un véritable travail d’investigation qui a valu au magazine des menaces de procès (bs) de la part de la Fondation.

 Les médias audiovisuels de Bosnie ne sont pas en reste sur la presse écrite ; sans même parler des médias locaux de Visoko (par exemple RTV Visoko) qui sponsorisent M. Osmanagic, la télévision publique fédérale (RTV FBiH) a multiplié les émissions sur la "vallée des pyramides". Elle a même embauché Semir Osmanagic, lui payant par la même occasion un voyage autour du monde, comme co-auteur d’une série "documentaire" de 12 épisodes intitulée "A la recherche des civilisations perdues", qui a été pour lui l’occasion d’exposer à loisir ses théories sur l’origine "atlantidienne" commune de toutes les pyramides et civilisations mégalithiques de la planète (voir les news de janvier, février et mars 2007 sur le site de la Fondation).

 Les médias étrangers sont un peu plus critiques sur le projet Osmanagic (et encore, beaucoup se sont dans un premier temps contentés de reproduire à l’identique, sans aucun recul, une dépêche de novembre 2005 de l’AFP et une dépêche d’avril 2006 de la correspondante d’Associated Press à Sarajevo bourrée d’erreurs et d’approximations, voir par exemple ici (en) ou là (fr)). Reste que souvent, même s’ils ironisent sur les théories de M. Osmanagic qu’ils ne prennent visiblement pas au sérieux, ils présentent ce dernier sous un jour plutôt favorable d’amateur enthousiaste, et insistent souvent sur les aspects "positifs" de l’affaire. Ainsi par exemple le journaliste Tihomir Loza, dans cet article (en) intitulé "Pyramid Scheme" et sous-titré "A Texan who sees the cradle of civilization in the Bosnian hills is at least helping the economy", écrit d’Osmanagic :

Is he then a charismatic madman ? He obviously is in possession of a considerable charisma, but his signature elation does not necessarily suggest madness. It rather radiates optimism and hope, two commodities that happen to be in short supply in Bosnia and that are usually in high demand even in the most developed democracies.
One can also half-jokingly argue that the optimism and hope that Osmanagic deals in are not totally misplaced. He’ll find no pyramids, but may really manage to attract some tourists. According to the project’s website, some 400,000 people from 80 countries visited Visoko last year, a pharaonic feast for a little town that doesn’t even boast a Sphinx.

(S’agit-il donc d’un cinglé charismatique ? Il fait incontestablement preuve d’un charisme considérable, mais son exaltation n’est pas forcément signe de folie. Elle rayonne plutôt l’optimisme et l’espoir, denrées plutôt rares en Bosnie et très demandées même dans les démocraties les plus développées. On pourrait aussi affirmer, en plaisantant à moitié, que l’optimisme et l’espoir dont Osmanagic fait commerce ne sont pas totalement mal placés. Il ne trouvera pas de pyramides, mais il pourrait réellement réussir à attirer des touristes. Selon le site web du projet, quelques 400 000 personnes de 80 pays différents ont visité Visoko l’année dernière, un festin pharaonique pour une petite ville qui ne peut même pas se glorifier de posséder un Sphinx.)

Comme on le voit, même si M. Loza ne croit absolument pas à l’existence des pyramides, on ne peut pas dire qu’il "persécute" M. Osmanagic dans cet article, article qui reprend par ailleurs sans vérification les chiffres probablement très surévalués de visiteurs fournis par la Fondation : 400 000 visiteurs, quand, selon les chiffres (en) de l’Organisation Mondiale du Tourisme, la Bosnie-Herzégovine n’avait reçu que 250 000 touristes en 2006 ; un responsable de l’Association touristique du Canton de Zenica-Doboj confirme d’ailleurs dans cet article (bs) qu’il n’a pas été constaté de forte augmentation du nombre d’arrivées et de nuitées dans la région de Visoko.

 On aurait pu s’attendre à une certaine méfiance des autorités religieuses de Bosnie vis à vis des idées de M. Osmanagic : autant que je sache, l’hypothèse de visiteurs extra-terrestres à l’origine du développement de l’Homo Sapiens et de la civilisation, telle qu’elle est exposée dans les ouvrages de ce dernier [3], est assez peu compatible tant avec la Bible qu’avec le Coran. Pourtant, à la différence de Galilée, non seulement M. Osmanagic n’a pas été accusé d’hérésie, mais il a bénéficié d’un soutien certain de ces autorités. Soutien épisodique, de la part du principal responsable catholique de Bosnie le cardinal archevêque Vinko Puljic, qui a reçu M. Osmanagic (bs) et ses collaborateurs en janvier 2007 et a envoyé à la Fondation en avril de la même année un "message de soutien" (bs) assez peu compromettant. Soutien beaucoup plus marqué et constant surtout de la part du Grand Mufti (Reis-I-Ulema) de Bosnie, Mustafa Ceric : celui-ci s’est rendu une première fois en août 2006 (bs) sur le site des "pyramides", où il a posé une truelle à la main sur les "dalles" de Pljesevica, dalles qui sont d’après lui "l’oeuvre de l’homme", et encouragé "l’enthousiaste" Semir qui a fait de Visoko "le centre du monde" ; cette première visite a été suivie d’une seconde, puis d’une troisième en juillet 2007 (bs), au cours de laquelle M. Ceric a confirmé son soutien sans faille à M. Osmanagic, déclarant (bs) même "il ne faut pas seulement soutenir Semir, nous avons aussi beaucoup à apprendre de lui", et n’hésitant pas, lui aussi, à le comparer à Giordano Bruno [4].

 Enfin, on ne peut pas non plus dire que M. Osmanagic ait été persécuté par "l’establishment" politique bosnien, bien au contraire, et c’est ce qui fait de cette affaire des "pyramides" un cas aussi unique dans les annales de la pseudo-archéologie. En effet, la quasi-totalité de la classe politique de Bosnie, que ce soit au niveau municipal, cantonal, ou fédéral, a soutenu activement son projet, tous partis confondus. Il serait trop long d’énumérer les personnalités politiques venues se faire photographier (certes autant pour leur publicité personnelle que pour la promotion du projet) sur les "pyramides", serrant la main de M. Osmanagic, lui donnant l’accolade, multipliant les déclarations de soutien dans la presse. Si ces visites de politiques se sont faites un peu plus rares dans la deuxième moitié de l’année 2007, il suffit de parcourir les archives des news du site web de la Fondation pour l’année 2006 pour se faire une idée de cette ruée, incluant des représentants de tous les échelons du pouvoir. Un seul responsable politique de quelque envergure a affiché son scepticisme - et l’a probablement payé cher en termes de popularité, le ministre de la Culture fédéral Gavrilo Grahovac. Mais sa volonté de limiter les risques que le projet fait courir à l’archéologie réelle, et d’empêcher l’attribution de subventions publiques à la Fondation (voir ici la position du ministre Grahovac sur M. Osmanagic et ses projets), a été ignorée par ses collègues du gouvernement et les responsables cantonaux qui n’ont pas tenu compte de ses avertissements et continué à soutenir et financer la Fondation (plus de 80 000 Marks convertibles par exemple attribués en 2007 par la municipalité de Visoko et le canton de Zenica-Doboj).

Inquisiteurs et autodafés

Mais, si ce ne sont ni les autorités religieuses, ni les autorités politiques, ni la presse, qui sont donc ces "persécuteurs" [5] de notre nouveau Galilée ou Giordano Bruno ? Les "nouveaux inquisiteurs" dénoncés par les partisans des "pyramides" sont en fait une poignée de scientifiques, géologues et archéologues, qui tentent depuis deux ans de dénoncer les divers dangers des projets de la Fondation et le soutien accordé par les autorités à la pseudo-science envahissante de M. Osmanagic et de son entourage. Mme Kujundzic-Vejzagic [6], M. Govedarica [7], M. Vrabac [8], et quelques autres : ils sont bien peu nombreux, ignorés généralement par la presse locale et les hommes politiques, abreuvés d’insultes sur les forums pro-pyramides, traités systématiquement de "scientifiques du XIXème siècle", de "scientifiques en fauteuil" et autres gracieusetés par M. Osmanagic, et ne sont guère soutenus que par quelques confrères étrangers comme M. Anthony Harding de l’Association Européenne des Archéologues. Pas vraiment de quoi parler "d’Inquisition"...

Récemment, quelques uns de ces scientifiques, des géologues, ont rédigé une lettre de protestation (bs) adressée au Recteur de l’Université des Sciences de Sarajevo, lettre dans laquelle ils s’élèvent contre l’organisation d’une "conférence", à destination des professeurs et étudiants, de M. Osmanagic, qui était annoncée pour le 29 janvier 2008, dans l’enceinte même de cette Université, la plus ancienne et la plus respectée des universités de Bosnie-Herzégovine. Il en va, disent-ils, de la respectabilité de l’Université, qui ne doit pas apparaître sur la liste des institutions qui "soutiennent" M. Osmanagic, et de l’image de la Bosnie-Herzégovine, qui est en train d’acquérir pour l’opinion internationale la réputation d’un pays où la pseudo-science l’emporte sur la science.

Pour une fois, cette protestation a semble-t-il rencontré quelque écho : la lettre a été reprise intégralement par l’agence FENA, et partiellement par quelques quotidiens ; et la conférence prévue a été annulée par le Recteur de l’Université. Il n’en fallait pas plus pour relancer chez M. Osmanagic et ses amis le "syndrome de Galilée", syndrome qui atteint une ampleur inédite dans une réaction (en) publiée sur le site de la Fondation par M. Ahmed Bosnic [9]. M. Bosnic, dans une grande envolée lyrique, s’offusque de cette inqualifiable atteinte à la "liberté d’expression" dans un "Etat européen du XXIème siècle", et n’hésite pas à comparer la "censure" dont est victime M. Osmanagic [10] avec les autodafés des livres de Protagoras et de Confucius, de ceux de la Bibliothèque d’Alexandrie, des codex pré-colombiens par les Espagnols, ou des livres d’auteurs juifs par les Nazis... Je laisse le lecteur seul juge de la portée et de l’intention de ces comparaisons !