Du mésusage de l’archéoacoustique
Article mis en ligne le 30 juillet 2013

par Irna

Depuis des années déjà, en l’absence de résultats archéologiques un tant soit peu probants, la Fondation de M. Osmanagic tente de prouver l’existence de pyramides gigantesques autour de Visoko en utilisant des arguments issus d’autres champs disciplinaires que l’archéologie. En particulier elle fait régulièrement procéder à diverses mesures de rayonnements électromagnétiques, d’auras, de champs "énergétiques" divers, dans le tunnel de Ravne et sur les collines "pyramidales". On a eu ainsi les "champs énergétiques verticaux et pulsants" enregistrés par le Docteur Harry Oldfield, les "vibrations énergétiques à 13 Hz" de l’Académicien Khavroshkin, le gadget détecteur de tous les gisements possibles et imaginables jusqu’à 20 km de profondeur de Zoran Kocic et sa société Aqua Mundi, le rayon d’énergie émis par une "plaque métallique", enterrée sous la pyramide à 2,4 km de profondeur et détectée par le physicien croate Slobodan Mizdrak (en)... sans compter l’image diffusée partout du même "rayon d’énergie" émergeant du sommet de Visocica :

Couverture du dernier livre de Semir Osmanagic
Cover of the latest book by Semir Osmanagic

Les équipements utilisés pour ces mesures sont parfois... curieux :

Davor Jadrijevic et son antenne maison
Davor Jadrijevic and his home-made antenna - Source

et il règne la confusion la plus totale sur ce qui est enregistré : "énergie", "vibrations", "émissions électromagnétiques", "ultrasons", "infrasons", "fréquence radio ultrason" (sic), tout y passe, sans qu’on sache souvent s’il s’agit d’ondes mécaniques, électromagnétiques, ou de formes d’énergie plus "mystérieuses" non définies. Bien évidemment, aucune de ces mesures n’a fait l’objet d’une publication, pas même sous forme d’un papier sur le site de la Fondation, la communication "scientifique" de celle-ci se réduisant à des vidéos diffusées sur son site et sur YouTube. Mais l’essentiel était d’offrir un peu d’extraordinaire pour pimenter les résultats plus que décevants des "fouilles" archéologiques : des énergies mystérieuses et des machines antédiluviennes enfouies sont autrement plus intéressantes que les sempiternelles "dalles de béton" et autres pavements que la Fondation présente depuis maintenant sept ans.

Dans cette entreprise de "validation par les vibrations" de ses hypothèses, M. Osmanagic a trouvé un allié de poids (même si parfois réticent) en la personne du professeur Paolo Debertolis, accompagné de son groupe SBRG. Le professeur Debertolis a commencé à s’intéresser à Visoko et ses "pyramides" à la fin de l’année 2010, et depuis son intérêt ne s’est pas démenti, bien que les relations n’aient pas toujours été faciles avec M. Osmanagic et la Fondation. Par contre cet intérêt s’est successivement porté sur des sujets bien différents, sans qu’on puisse toujours y déceler une logique autre que la volonté de continuer à s’investir à tout prix dans la région de Visoko malgré les échecs successifs du groupe.

Dans un premier temps, le professeur Debertolis semblait adhérer totalement aux thèses de M. Osmanagic : pyramides artificielles, tunnels de Ravne construits en béton plutôt que creusés dans un conglomérat naturel, gigantesques mégalithes en céramique contenant des objets métalliques... Cette première phase a pris fin lorsqu’un membre de son propre groupe, la géologue Emanuela Croce, lui a communiqué le résultat de ses analyses, tant de la "céramique" des mégalithes du tunnel de Ravne, que du "béton" formant les parois du tunnel et les versants de Visocica : ces analyses sont sans appel, ni céramique ni béton, mais bien du grès et du conglomérat totalement naturels [1].

La deuxième phase de l’activité du professeur Debertolis à Visoko s’est traduite par un intérêt marqué pour les stecci, ces monuments emblématiques de la Bosnie médiévale. Un intérêt d’abord très influencé par l’orientation pseudo-archéologique d’un des membres du groupe, Nenad Djurdjevic, qui amène le professeur à publier sur son site une série d’articles bourrés d’erreurs et d’approximations visant à faire des stecci les témoins d’une hypothétique "civilisation de la vieille Europe" au sens de Marija Gimbutas [2]. Par la suite, peut-être du fait de sa rupture avec Nenad Djurdjevic, ou du fait des critiques entraînées par son approche par trop pseudoscientifique de l’archéologie de Visoko, le professeur Debertolis a semblé pendant quelque temps revenir à une approche plus classique, avec un projet d’inventaire des stecci (en), et une collaboration avec le musée de Visoko et son directeur Senad Hodovic. Le SBRG a même à un moment envisagé une collaboration à plus grande échelle avec le Musée national (Zemaljski Muzej) de Sarajevo, dont le professeur Debertolis a approché le directeur, Adnan Busuladzic, sans doute par l’intermédiaire d’une historienne croate, Jadranka Drempetic (en) (voir au bas de la page, "anciens membres du groupe). Cette tentative a fait long feu, Adnan Busuladzic ayant probablement craint (it) que les liens passés du SBRG avec M. Osmanagic, et ses antécédents de pseudo-archéologie, ne soient préjudiciables à une archéologie bosnienne déjà bien mal en point. Il est fort possible que l’apparition de membres du SBRG, dont le professeur Debertolis, dans une émission pseudoscientifique consacrée aux "pyramides" [3] peu de temps avant la formalisation d’un accord avec le Musée national soit à l’origine de cet échec, comme semble le montrer cette traduction (en italien puis français) de la lettre de refus envoyée par M. Busuladzic :

Je suis au regret de devoir vous informer de certaines décisions. Nous ne pouvons nous associer pour aucun projet avec les messieurs qui sont venus au Musée avec vous. En fait, un de nos Comités Scientifiques réguliers vient juste d’avoir lieu, pendant lequel les propositions de nouveaux projets ont été discutés.

Malheureusement, ce programme de télévision est intervenu au plus mauvais moment. Vos collègues y ont évoqué les "pyramides" en termes très positifs, ont parlé de leur grande importance, des excellents résultats obtenus, de civilisations anciennes, de l’identité des membres de ce groupe de recherche - et se sont ainsi eux-mêmes retranchés de la catégorie des partenaires sérieux avec qui nous pouvons et souhaitons entreprendre une coopération sérieuse.

Je suis sûr que vous admettrez qu’aucune institution réputée ni aucun individu ne peut souhaiter être associé à un tel comportement. Je suis un peu troublé par ceci, car vous m’aviez laissé l’impression d’une personne très professionnelle, honnête et directe. Croyez-moi, je n’ai jamais encore vécu une telle situation, et cela me cause beaucoup de souci. (...)

Je puis vous assurer que, en ce qui vous concerne personnellement, nous sommes toujours disposés à vous offrir notre assistance sur toute question et à tout niveau. Je n’aimerais certes pas me trouver à votre place lorsque vous devrez expliquer le contenu de cette lettre à vos collègues.

Avec le plus profond respect, Adnan Busuladžić

Quoi qu’il en soit, depuis cet échec le professeur Debertolis, furieux contre l’ensemble des archéologues de Bosnie, se répand sur les forums (sous le pseudo de "Pablito") en accusations contre eux : il accuse (en) par exemple l’équipe responsable de la restauration de la forteresse de Visoki d’avoir commis un faux, d’avoir sciemment modifié l’aspect de la forteresse afin de cacher son supposé rôle religieux dont on parlera plus bas ; ou bien il accuse (it) les membres de la Commission pour la Protection des Monuments nationaux d’être à la solde des islamistes turcs, et de lui avoir interdit l’étude de restes humains, datés du XVIème et du début du XVIIème siècles (donc de l’époque de la Bosnie ottomane), trouvés dans une nécropole de stecci, parce que sa découverte aurait "remis en cause la pureté de la foi musulmane" en Bosnie à cette époque-là [4]. Ce que le professeur Debertolis oublie de dire d’après ce post d’un archéologue bosnien (en), c’est qu’il n’avait pas les autorisations nécessaires pour exhumer des restes humains, et encore moins pour les envoyer à l’étranger pour datation, et que c’est ce fait qui a motivé la réaction de la Commission, plutôt qu’un supposé complot des archéologues (en) contre le professeur Debertolis et son groupe de recherche.

Le professeur Debertolis se retrouve donc à la fois en désaccord avec M. Osmanagic, dont il ne peut plus suivre les théories les plus extravagantes suite aux travaux de sa géologue [5] ; et avec l’archéologie "officielle" de Bosnie, qui se méfie profondément de tout ce qui est lié de près ou de loin à M. Osmanagic et sa pseudo-archéologie. Il semble que le professeur Debertolis soit lui-même tiraillé entre deux extrêmes, comme en témoigne la très nette différence dans les propos et le ton entre deux des forums italiens auxquels il participe. Ainsi, sur le forum archéologique "Ostraka" (it), fréquenté par beaucoup d’archéologues professionnels et d’amateurs compétents, il met l’accent sur son statut universitaire, la dimension scientifique de son travail, et évite soigneusement de mentionner la moindre idée farfelue : pas un mot par exemple sur les "fantômes" du tunnel de Ravne (en), ou sur la présence, sous la "pyramide", de quelque chose "qui fonctionne encore" (à 0:44) ; à l’inverse, sur le forum "nibiru2012", où il est le principal intervenant du très long fil (it) (275 pages à ce jour !) consacré aux "pyramides" de Bosnie, et entouré par un public crédule et complaisant, il laisse plus facilement aller son imagination : il laisse régulièrement entendre (it) qu’il a découvert quelque fantastique secret sous la pyramide, entretient le mystère (it) autour des pyramides ou du tunnel, ou diffuse lien après lien vers des histoires délirantes d’OVNIs...

En tout cas, depuis l’échec de son rapprochement avec le Musée national de Sarajevo, le professeur Debertolis s’est replié sur le troisième de ses centres d’intérêt : il s’est improvisé, sans plus de compétences particulières que pour les sujets précédents [6], archéoacousticien. L’archéoacoustique - à bien distinguer de l’ethnologie musicale ou archéologie musicale - est une discipline relativement récente, au carrefour de plusieurs champs scientifiques ; elle s’intéresse à l’étude des propriétés sonores des sites ou des artefacts archéologiques. Une des difficultés majeures de la discipline est d’arriver à établir l’intention des constructeurs : on peut identifier les propriétés acoustiques d’un site ou d’un artefact, mais il est généralement très difficile de déterminer si ces propriétés sont le résultat d’une volonté, ou celui du hasard - bien des grottes par exemple ont des propriétés acoustiques très particulières, sans que l’homme y soit pour rien. C’est donc un domaine où se cotoient le pire et le meilleur ; on a par exemple des études intéressantes de lithoacoustique (en) (acoustique des objets lithiques, ici essentiellement du silex), ou sur l’utilisation de "pots acoustiques" dans les églises médiévales ; on peut aussi citer, même s’il est assez controversé par ailleurs, Paul Devereux (en) et son travail par exemple sur Avebury (en), qui reste assez prudent dans ses conclusions. Mais comme l’archéo-astronomie, l’archéo-acoustique a aussi donné lieu à bien des dérives (en), bien des interprétations imprudentes (en), et bien des récupérations (en) par les idées New Age.

Depuis maintenant plus de deux ans, le professeur Debertolis et le groupe SBRG multiplient donc les mesures et enregistrements, particulièrement sur Visocica (en) et dans le tunnel de Ravne (en), puis, à partir de 2012, sur divers sites italiens (en) et britanniques (en). Ces expériences et enregistrements portent sur la gamme sonore audible, mais aussi et surtout sur les fréquences totalement inaudibles pour l’oreille humaine, ultrasons et infrasons, ce qui pose le problème, en admettant que les sites étudiés aient été conçus dans le but de produire ou concentrer ces fréquences inaudibles, de la capacité des hommes préhistoriques à percevoir ces fréquences, comme le souligne (it) un intervenant sur le forum italien Ostraka dans un fil de discussion consacré aux recherches archéoacoustiques du professeur Debertolis. Dans le même fil est également posée la question (it) de l’origine de ces fréquences, dont le professeur Debertolis affirme parfois qu’elles sont produites artificiellement et volontairement par les constructeurs des sites, et parfois que ces constructeurs ont simplement utilisé des émissions naturelles. Parallèlement le groupe SBRG, qui a intégré récemment deux des physiciens ayant mené pour le compte de la Fondation quelques unes des mesures évoquées au début de cet article, Slobodan Mizdrak et Davor Jadrijevic (en), poursuit également ses recherches dans le domaine des émissions électromagnétiques (en) sur les mêmes lieux.

Mon but ici n’est pas d’étudier les travaux archéoacoustiques du SBRG sur les sites archéologiques italiens et anglais, travaux qui sont encore en attente de validation scientifique par des publications. Ce qui m’intéresse ici est la partie de ces recherches qui concerne la région de Visoko, et dont quelques résultats très partiels ont été récemment présentés lors de deux "conférences virtuelles" sur internet. J’ai décrit ici mes doutes concernant ces deux conférences non spécialisées et concernant la qualité du "peer-reviewing" par des comités scientifiques ne comportant aucun archéologue, et dont les avis de relecture sont pour le moins succincts (en).

Le premier papier, The phenomenon of resonance in the Labyrinth of Ravne (Bosnia-Herzegovina) (en), est consacré aux phénomènes de résonance dans le tunnel de Ravne, étudiés à l’aide de chanteurs. Un bon tiers du papier de 4 pages est consacré à une définition assez vague et peu scientifique de la résonance ("resonance is the phenomenon in which an object absorbs energy, transforms it and makes it again in another form, but better" - sic), puis aux études (en) antérieures menées sur six sites mégalithiques anglais ou irlandais par le groupe PEAR (en) de l’Université Princeton autour de Robert Jahn et Paul Devereux évoqué plus haut. On a ensuite une présentation du tunnel de Ravne et du matériel utilisé pour les expériences, dont les résultats tiennent en un paragraphe : l’équipe a pu identifier une résonance aux basses fréquences, aux alentours de 71 Hz. Il est précisé en conclusion qu’il s’agit d’un résultat préliminaire qui nécessitera des recherches supplémentaires.

Rien de problématique dans cette recherche, mais ce sont les présupposés du professeur Debertolis qui, à mon avis, sont très discutables. Il part en effet du principe que le tunnel de Ravne est d’époque néolithique, comme les sites étudiés par le groupe PEAR : "These were considered by some to be very old mines perhaps of the Neolithic period, but without valuing it as a very special temple, where ceremonies could have taken place." Que le tunnel de Ravne soit une ancienne mine, c’est effectivement une hypothèse assez plausible, et quelques unes des découvertes dans les nouvelles sections du tunnel mentionnées dans le "rapport officiel" (en) de la Fondation pour 2012, rédigé par Riccardo Brett, semblent bien aller dans ce sens : traces de roues (page 34), niches dans les parois avec des traces de suie (page 35), traces de pic de mineur (page 36), et surtout lampe à huile du XVIIe ou XVIIIe siècle (page 40) :

Par contre, ces éléments archéologiques évoquent plutôt une mine assez récente, d’époque moderne et non néolithique ! Et à ma connaissance absolument rien dans les fouilles réalisées dans ce tunnel ne permet d’évoquer un rôle de temple ou le déroulement de cérémonies.

Le professeur Debertolis annonce ensuite le but de sa recherche : "We wanted to find those sounds found in prehistoric and protohistoric ancient temples". On part donc du principe que le tunnel avait quelque fonction religieuse - encore une fois sans aucun argument archéologique allant en ce sens - et on cherche à y reproduire les phénomènes observés sur les sites anglais. Intervient alors un autre présupposé : "The purpose of this research was to
determine whether the morphology of the tunnel was a random excavation typical of a mine and therefore free from special acoustic phenomena such as resonance or their design was for another purpose such for ceremonies as found in Great Britain and Ireland"
. On affirme, sans argumentation et sans expériences témoin, qu’une mine aux galeries "aléatoires" ne peut pas présenter de phénomènes acoustiques spéciaux, et donc que la présence d’un tel phénomène implique forcément une volonté consciente de la part des constructeurs, qui plus est dans un but religieux ou mystique. C’est oublier un peu vite que de nombreux espaces "aléatoires", naturels ou non (grottes, mines...) offrent des exemples de phénomènes acoustiques très particuliers ; on mentionnera le cas de la grotte de Fingal, ou les travaux de Iégor Reznikoff et Michel Dauvois qui semblent montrer que les hommes préhistoriques utilisaient certaines propriétés acoustiques naturelles des grottes en disposant leurs peintures en des lieux de résonance privilégiée. Et la conclusion de l’article reprend la même idée : "Although only preliminary, the examination carried out shows it would appear difficult to achieve a similar sound in a structure whose path is just random as is typical of a mine." Le groupe SBRG n’ayant pas, à ma connaissance, procédé à la même expérience dans d’autres mines, il n’a rien montré de tel.

On a donc affaire dans ce papier à un raisonnement typiquement circulaire : on part du principe que le tunnel de Ravne est un "temple" ou lieu de cérémonie néolithique, on constate dans ce tunnel un phénomène de résonance sonore, et on déduit de ce phénomène que le tunnel est bien un "temple", construit volontairement pour produire cet effet de résonance.

On retrouve le même type de raisonnement dans le deuxième papier, Archaeoacoustics in ancient sites (en). La thèse de cet article est que de nombreux édifices "sacrés" auraient été localisés volontairement dans des lieux où se produisent des émissions d’infrasons ou ultrasons pouvant entraîner un "état mystique", et la circularité du raisonnement est évidente dans le paragraphe qui définit la démarche suivie : "From this assumption from 2010, we decided to begin researching these frequencies in “sacred” ancient and well known archeological sites. This study gave amazing results for a possible explanation as to why a particular site was considered sacred."

Les deux lieux "sacrés" étudiés dans cet article sont l’un l’abbaye San Salvatore près du Mont Amiata dans la province de Sienne pour les ultrasons, et l’autre la colline de Visocica, la "pyramide du Soleil" de M. Osmanagic, pour les infrasons. Première curiosité : seuls les "infrasons et basses fréquences" sont évoqués dans cet article pour Visocica, alors que la quasi-totalité des recherches et campagnes de mesures du SBRG sur cette colline étaient consacrées aux ultrasons de la "voix de la pyramide" (cf. en janvier 2011 (en), en février 2011 (en), en mai 2011 (it), puis à nouveau en mars 2012 (en) et en avril 2012 (en)). Une seule expédition de dernière minute, en avril 2013 (annoncée ici (it) comme une "mission secrète"...), s’est intéressée aux infrasons, enregistrés au milieu des ruines de la forteresse sur Visocica ainsi que sur une colline non précisée des environs. Or c’est bien cette seule très courte campagne de mesure des infrasons qui est utilisée dans l’article, qui ne dit curieusement pas un mot de la "voix de la pyramide" et des résultats obtenus sur les ultrasons lors de la série de campagnes de 2011-2012.

Mais le principal problème n’est pas là : l’article s’annonce comme une étude d’archéoacoustique, et présente donc Visocica comme un site archéologique "ancien" et un site "sacré" : "The hypothesis of our research group is that in some archaeological sites considered sacred for thousands of years, there are measurable natural audio phenomena that make the place somewhat more mystical than others" ou : "We observed that when we found a natural interesting phenomenon, the archaeological site was very ancient and important and had a church or temple present long before the arrival of medieval churches". Dans le même article, l’auteur affirme également que les bâtiments médiévaux au sommet de la colline de Visocica comprenaient non seulement une forteresse mais aussi un monastère : "We found interesting archaeoacoustics effects [...] among ruins of medieval monastery/fortress on the top of the Visoćica Hill" et : "Visoki was a famous medieval royal castle town and monastery destroyed by the Ottomans during the fourteenth century. The first mention of the town was in 1355 by King Tvrtko I of Bosnia, but from ancient artifacts found in that location we can suppose that a settlement was present from very ancient times".

L’affirmation m’a quelque peu surprise, aucun historien n’ayant à ma connaissance jamais évoqué de monastère sur Visocica. J’ai essayé d’en discuter avec le professeur Debertolis sur le forum d’archéologie italien Ostraka, d’autant qu’il affirmait sur ce même forum : "La cosiddetta Piramide del Sole è in realtà una collina naturale forse rimodellata a forma di piramide. Ma il luogo è considerato sacro da millenni" ("La soi-disant Pyramide du Soleil est en réalité une colline naturelle peut-être remodelée en forme de pyramide. Mais le lieu est considéré comme sacré depuis des millénaires"). Je lui ai donc demandé (en) s’il pouvait fournir quelques preuves ou arguments pour ces affirmations, celle d’un "remodelage" par l’homme de la colline, et celle de la "sacralité" du lieu.

S’en est suivi un échange parfois houleux sur ce forum italien, que je vais essayer de résumer ici : le professeur Debertolis ("Pablito") commence par refuser de répondre (it), puis recourt à des attaques personnelles (it) infondées, m’obligeant à quelques mises au point et à recentrer le débat (en) sur la question centrale : sur quels arguments, historiques ou archéologiques, s’appuie-t-il pour affirmer que Visocica est un "ancien site sacré" qui justifierait une étude archéoacoustique ?

C’est dans un autre fil (en) du même forum que quelques réponses commencent à arriver : tout d’abord le "remodelage" de la colline de Visocica par l’homme, d’après le professeur Debertolis (it - en), est évident puisqu’il y a un fossé, bien visible sur les photos aériennes, au sommet de la colline :

L’argument est un peu spécieux : bien évidemment la construction de la forteresse médiévale a entraîné un certain aménagement du sommet, mais il me semble y avoir une grande différence entre ce fossé médiéval et l’affirmation antérieure du professeur Debertolis d’un "remodelage en forme de pyramide" ("rimodellata a forma di piramide"). Mais passons... On en vient ensuite à l’âge (it - en) des restes les plus anciens trouvés sur la colline : le professeur présente diverses trouvailles (sans contexte en l’absence de fouilles sur ce site protégé) qui évoquent une occupation largement antérieure au Moyen Age, ce qui n’a rien de surprenant dans cette région ; comme je l’évoquais ici (en), la plupart des hauteurs de la région ont connu des installations plus ou moins fortifiées (qui portent d’ailleurs souvent le nom de "grad", comme le sommet de Visocica) à l’âge du Bronze ou l’âge du Fer, et l’occupation préhistorique de Visocica était déjà évoquée par les préhistoriens de Bosnie.

On en arrive enfin à la question de la sacralité de Visocica (it) ; pour résumer l’argumentation du professeur Debertolis, sa thèse d’un lieu "sacré" s’appuie principalement :
 sur "un grand nombre d’histoires, légendes et mythes" associés à la colline de Visocica transmis par "diverses autorités morales", et sur divers racontars de la population locale ;
 sur le témoignage d’une "autorité religieuse", non nommée, attestant que le sommet de la colline portait, plutôt qu’une "sinistre citadelle", un "centre spirituel et de conservation de la culture" ;
 enfin sur un certain nombre d’extraits (it) du site officiel de la Commission pour la Préservation des Monuments Nationaux sur le fort de Visoki (en) sur Visocica, extraits soigneusement reformulés grâce auxquels il fait affirmer à l’historien Pavao Andelic que le siège de l’évêché de Bosnie se trouvait à Visoki, et que c’est également à Visoki que se déroulait le couronnement des rois de Bosnie, confirmant ainsi le rôle de direction spirituelle et morale de ce qui était plus une abbaye qu’une forteresse.

Il termine ce post en impliquant qu’il y aurait une volonté d’effacer ce passé religieux et spirituel de Visocica de la part de la Commission et des archéologues bosniens, qu’il va même accuser (it) un peu plus loin, comme déjà évoqué plus haut, d’avoir créé un "fake" lors de la restauration de la forteresse, et dont il affirme (it) qu’ils sont guidés par la haine religieuse et manipulés par les islamistes turcs...

Dans ma réponse (en) à ce post, j’insiste d’une part sur la fragilité des témoignages oraux recueillis auprès de la population locale, d’autant que ce que les sociologues américains appellent parfois "pizza effect" (en) semble jouer à plein depuis 2005 et la venue de Semir Osmanagic à Visoko, amenant de nombreux habitants à se "remémorer" des légendes, ou à ré-interpréter différemment les inévitables légendes qui existent autour de tout château médiéval ; d’autre part sur la difficulté à prendre en compte sa source ("l’autorité religieuse") anonyme. Je rectifie surtout, en citant le texte original, son interprétation du texte sur Visoki sur le site de la Commission : Pavao Andelic n’a jamais placé à Visoki le siège de l’évêché, ni affirmé que le couronnement des rois de Bosnie s’y déroulait. Dans ses citations tronquées, le professeur Debertolis rattache à Visoki toute une série d’éléments qui concernent l’ensemble de ce que les textes médiévaux appelaient "Bosna", c’est-à-dire la petite région s’étendant sur toute la vallée de Visoko. Le siège de l’évêché était, d’après Andelic, "quelque part dans la plaine de Visoko", peut-être à Mostre, où se trouvait également l’Université médiévale de "Bosna" ; le couronnement d’une partie des rois de Bosnie a eu lieu à Mile (l’actuel Arnautovici). Andelic attribue plutôt la fonction de "centre politique, administratif, spirituel et culturel" à l’ensemble de la "Bosna", de la petite région, et non à Visoki, dont il précise bien que la forteresse n’avait qu’un rôle militaire et administratif (elle était le siège de l’administration locale exercée au nom du roi de Bosnie par un seigneur féodal, le "Veliki Knez Bosanski", "Grand Prince de Bosnie"), et parfois le siège temporaire de la cour nomade des rois de Bosnie.

La réponse (it) de "Pablito" à ce post me paraît quelque peu indigente :
 il me reproche de ne donner comme source que le texte du site de la Commission, et de ne pas donner les sources primaires - oubliant que son propre message ne s’appuyait que sur ce même texte, le donnant en outre de façon tronquée ;
 il prétend avoir lu le livre de Pavao Andelic, mais ne le cite pas, ne donne pas de références, et interprète la position d’Andelic de façon totalement erronée ;
 il m’accuse de ne réclamer le nom de sa source anonyme qu’afin de pouvoir "lui créer des problèmes" ;
 il part dans une digression incohérente sur les soi-disant enjeux religieux qui l’ont empêché de mener à bien ses recherches à Visoko, et sur le complot islamiste turc pour "mettre un pied en Europe" (voir ici (en) la réponse d’un archéologue travaillant en Bosnie à ces allégations) ;
 il prouve qu’il n’a rien compris à ce qu’est le "pizza effect" ;
 il me reproche de "travailler à distance" et de ne pas être sur le terrain - ce que je n’ai jamais caché - en oubliant que la charge de la preuve repose sur lui : c’est à lui, parce qu’il est "sur le terrain" et qu’il prétend offrir une étude "archéoacoustique" de Visocica, de prouver ce qu’il avance, c’est-à-dire l’existence d’un monastère sur Visocica, sans même parler d’un lieu de culte plus ancien.

Bref, à l’issue de cette discussion nous ne sommes pas plus avancés : pseudo-légendes, source anonyme, citations tronquées et déformées d’un historien, le professeur Debertolis n’offre rien de plus à l’appui de sa thèse d’un "lieu sacré". Or c’est bien là-dessus que repose tout le raisonnement circulaire de son article : Visocica est un lieu sacré, donc j’y cherche des ultrasons ; j’ai trouvé des infrasons (laissant tomber au passage les ultrasons), donc Visocica est bien un lieu sacré... Si les prémisses (la sacralité de Visocica) sont fausses, le reste du raisonnement perd tout intérêt, et les infrasons en question, en admettant même qu’il ne s’agisse pas d’un phénomène aléatoire (une seule courte campagne et une seule colline "témoin" me paraissent peu pour s’en assurer), n’ont rien à voir avec l’archéologie. Très clairement, cet article, de même que l’ensemble de ses recherches "archéoacoustiques" à Visoko, m’apparaît comme une tentative a posteriori de justifier l’intérêt de l’auteur pour les "pyramides" dont il a beaucoup de mal à accepter l’inexistence...


Epilogue

J’avais écrit une dernière réponse à "Pablito" au sujet du monastère inexistant de Visocica, que je joins ci-dessous :

QUOTE (Pablito50 @ 23/6/2013, 03:50)
Pablito : Ti faccio un esempio. Irna ha scritto un post lunghissimo vertendo quasi tutto il suo intervento sul decreto della Commissione per la Conservazione dei Monumenti della Bosnia-Erzegovina come se questo fosse una fonte primaria. Ma chiunque abbia un po’ di preparazione sa che va considerata casomai come una fonte secondaria. Oppure non cita la fonte delle sue altre notizie sul Regno di Bosnia.

[Pablito : Je vais te donner un exemple. Irna a écrit un très long post basé presqu’uniquement sur le décret de la Commission pour la Préservation des Monuments de Bosnie-Herzégovine, comme si c’était une source primaire. Mais quiconque a un peu l’habitude sait qu’on ne peut le considérer au mieux que comme une source secondaire. De plus elle ne cite pas la source de ses autres informations sur le royaume de Bosnie.

Irna : I don’t understand. Your message http://ostraka.forumfree.it/?t=53186252&st=225#entry537124116, to which I was answering, gave only this one source (decreto della Commissione), and I commented on the interpretation you made of this source. As far as I can see, you didn’t give your primary sources either, did you ?

[Irna : Je ne comprends pas. Votre message http://ostraka.forumfree.it/?t=53186252&st=225#entry537124116 auquel je répondais ne donnait lui-même que cette unique source (décret de la Commission), et je commentais l’interprétation que vous faites de cette source. Autant que je sache, vous n’avez pas non plus donné vos sources primaires, n’est-ce pas ?]

Pablito : Non si è posta il problema di andare a cercare le vere fonti primarie come ad esempio il libro originale di Anđelić e curiosare un po’ su cosa aveva realmente scritto nel 1984. Il mio gruppo lo ha fatto, invece, con molta fatica a procurarselo ed a tradurlo per impostare correttamente il problema.
Come si fa a rispondere serenamente a tanta superficialità ?

[Pablito : Le problème d’aller chercher les vraies sources primaires, comme par exemple le livre original d’Andelic, et d’aller voir de plus près ce qu’il a vraiment écrit en 1984, n’est pas soulevé. Mon groupe l’a fait, nous avons eu beaucoup de difficulté pour nous procurer et traduire ce livre, de façon à poser correctement le problème. Comme répondre sereinement à tant de superficialité ?]

Irna : I did not understand that your explanation was based on Andelic’s book, as you gave no page references, nor even the title of the book. I supposed it’s « Visoko i Okolina kroz Istoriju » ? I don’t have this book at home, but I read it some time ago, and I don’t remember him saying that the seat of the bishopric was in Visoki, nor that the Bosnian kings were coronated in the fortress. In fact, Andelic is the one who definitively identified the medieval Mile with the present Arnautovici after the excavations he made there from 1976 to 1978, and that he presented in his book « Krunidbena i grobna crkva bosanskih vladara u Milima (Arnautovićima) kod Visokog » in 1980.

[Irna : Je n’avais pas compris que votre explication reposait sur le livre d’Andelic, puisque vous ne donniez pas de références aux pages, même pas le titre du livre ! Je suppose qu’il s’agit de "Visoko i Okolina kroz Istoriju" ? Je n’ai pas ce livre chez moi, mais je l’ai lu il y a quelque temps, et je n’ai pas souvenir qu’il dise que le siège de l’évêché était à Visoki, ou que les rois de Bosnie étaient couronnés dans la forteresse. En fait c’est Andelic lui-même qui a définitivement identifié le Mile médiéval avec le Arnautovici d’aujourd’hui lors de sa campagne de fouilles de 1976-1978, identification publiée dans son livre "Krunidbena i grobna crkva bosanskih vladara u Milima (Arnautovicima) kod Visokog" en 1980.]

Irna : He also worked much on the Visoko valley, even before he published « Visoko i Okolina » ; in one of the books I have, « Bobova i Kraljeva Sutjeska », published in 1973, a large part of Chapter V, « Opci pogled na sjedista Bosanskih Vladara u Srednjem Vijeku » (« On the seat of the Bosnian Power in the Middle Age », page 221), is devoted to the rôle of Visoko valley. He presents the small region called « Bosna » or « Civitas Bosna », 5 or 6 km large, that was the heart of the kingdom, the seat of the bishop and of the political power, and discusses the long contested location of Mile. He lists the important places in Civitas Bosna :
 Biskupici, with the church of Ban Kulin ; maybe one of the seats of the Bosnian catholic bishop or of the « Djeda » (the Ancient) of the Bosnian Church
 Mile, where was the church and Franciscan monastery Sveti Nikola, place of coronation for the kings and grave for some of them, excavated in 1909-1910 by Carl Patsch, and in 1976-1978 by Andelic. In the same Mile took place some of the « Sabors », the Bosnian medieval parliament.
 Mostre, royal court, first Bosnian University, maybe one of the seats of the Bosnian catholic bishop or of the « Djeda » (the Ancient) of the Bosnian Church
 Podvisoki, royal court (probably in the present part of the town Visoko called « Kraljevac », that is « royal »), commercial center ; the name changed to Visoko during the Ottoman power.
 Grad Visoki, fortress and seat of the feudal lord called « Veliki Knez Bosanski » (High Prince of Bosna, who is not the king, but a feudal lord of the Bosna valley), destroyed by the Ottoman invasion
 Selo Grad (the village Grad, West of the fortress)

[Irna : Il a aussi beaucoup travaillé sur la vallée de Visoko, même avant de publier "Visoko i Okolina" ; dans un des livres que j’ai, "Bobova i Kraljeva Sutjeska", publié en 1973, une grande partie du chapitre 5, "Opci pogled na sjedista Bosanskih Vladara u Srednjem Vijeku" ("Sur le siège du pouvoir royal de Bosnie au Moyen-Age", page 221) est consacrée au rôle de la vallée de Visoko. Il présente la petite région appelée "Bosna" ou "Civitas Bosna", de 5 à 6 km de large, qui était le coeur du royaume, comprenant le siège de l’évêché et du pouvoir politique, et il discute l’emplacement, longtemps contesté, de Mile. Il fait la liste des lieux importants à l’intérieur de la Civitas Bosna :
 Biskupici, avec l’église de Ban Kulin ; peut-être siège de l’évêque catholique de Bosnie, ou du "Djeda" (l’Ancient) de l’Eglise bosniaque
 Mile, où se trouvaient l’église et le monastère franciscain de Saint Nicolas, lieu de couronnement des rois et tombe de certains d’entre eux, a été fouillé en 1909-1910 par Carl Patsch, puis en 1976-1978 par Andelic. Dans le même Mile se tenaient certains des "Sabors", les parlements médiévaux.
 Mostre, où se trouvait la cour et la première université de Bosnie, était peut-être aussi siège de l’évêque catholique ou du "Djeda" de l’Eglise bosniaque
 Podvisoki, également lieu de résidence de la cour (probablement dans le quartier actuellement appelé "Kraljevac", ce qui signifie "royal") et centre commercial ; le nom est devenu Visoko pendant la période ottomane.
 Grad Visoki, forteresse et siège du seigneur féodal appelé "Veliki Knez Bosanski" (Grand Prince de Bosna, qui n’est pas le roi, mais un seigneur féodal de la vallée de la Bosna), a été détruite par l’invasion ottomane
 Selo Grad (le village de Grad à l’ouest de la forteresse).]

Irna : For a better understanding, I join the map published by Andelic in the same book.

[Irna : Pour faciliter la compréhension je joins la carte publiée par Andelic dans ce même livre.]

Irna : As far as I remember, in « Visoko i Okolina kroz Istoriju » his presentation of the Visoko valley in the Middle Age is not very different, and I’m not aware of a more recent publication which could have put in question this view of the Visoko valley, where the citadel on Visocica was only a part, and not the most important, of « Bosna ».

[Irna : Autant que je me souvienne, dans "Visoko i Okolina kroz Istoriju" sa présentation de la vallée de Visoko au Moyen Age est à peu près identique, et à ma connaissance aucune publication plus récente ne remet en cause cette description de la vallée de Visoko, où la citadelle sur Visocica ne formait qu’une partie, et pas la plus importante, de la "Bosna".]

Pablito : Così in maniera perentoria si domanda chi è questa autorità ecclesiastica che ci ha fornito così tante informazioni. Si vuole il suo nome e cognome, magari il grado ecclesiastico e magari anche di che confessione. Magari per metterlo alla berlina oppure per creargli problemi come al direttore del Museo di Visoko, Senad Hodović, che ha avuto il coraggio di collaborare con noi, gruppo straniero, per una classificazione ed approfondimento della storia sugli stećak (sic).

[Pablito : Ainsi il m’est demandé, d’une manière péremptoire, qui est cette autorité ecclésiastique qui a fourni tant d’informations. On veut son nom, son prénom, peut-être aussi son rang ecclésiastique ou même sa dernière confession. Peut-être pour le mettre au pilori, ou lui créer des problèmes comme au directeur du Musée de Visoko, Senad Hodovic, qui a eu le courage de collaborer avec nous, un groupe étranger, sur une classification et des recherches sur l’histoire des stecak (sic).]

Irna : Hum, no name, no publication... Not what I would call a valid source :(

[Irna : Hum, pas de nom, pas de publications... Ce n’est pas vraiment ce que j’appellerais une source valide :( ]

Pablito : Per questo concordo pienamente con la frase di chiusura nel post di Igol riguardo il fatto che la ricerca in Bosnia è minata alle basi da questioni politico religiose. Ma direi più politiche che religiose.

[Pablito : En ceci je suis tout à fait d’accord avec la phrase de conclusion du post d’Igol, sur le fait que la recherche en Bosnie est minée à la base par des questions politiques et religieuses. Mais je dirais plutôt politiques que religieuses.]

Irna : There was also that in Igol’s post : « Credo che il Dott.De Bertolis dovrebbe citare le fonti, e non solo definirle come ente morale. Non credo che si possa definire un passo breve il passaggio di una rovina fra forte di avvistamento a centro monastico, in assenza di documentazione e ritrovamenti basandosi su un percorso logico che potrebbe pure stare in piedi. Ma solo se supportato non solo da convinzioni, ma da ritrovamenti e documentazione. »

[Irna : Il y avait aussi, dans le post d’Igol, ceci : "Je crois que le Dr De Bertolis devrait citer ses sources, et pas seulement les définir comme autorités morales. En l’absence de documentation et de trouvailles basées sur une démarche logique et tenant la route, je ne crois pas qu’on puisse ainsi passer de l’observation d’un fort en ruine à un centre monastique. Il ne suffit pas de convictions, il faut des trouvailles et des documents."]

QUOTE (Pablito50 @ 23/6/2013, 09:13)
Pablito : Si tratta quindi di tirare le conclusioni a questa storia. Possiamo però dire che gli archeologi bosniaci non si sono comportati diversamente da Osmanagić quando si tratta di manipolare la storia. Se vi sono altri interessi politici intercorrenti è chiaro che non hanno alcun desiderio ad approfondire la presenza di un insediamento neolitico sulla cima della collina di Visoćica, nonostante i reperti ritrovati e da me segnalati (senza considerare anche la venere paleolitica, ma non trovata da me). Così non vi è neppure la possibilità di ricercare l’edificio sacro presente all’interno del comprensorio.

[Pablito : Il est temps maintenant de tirer les conclusions de cette histoire. Nous pouvons donc dire que les archéologues bosniens ne se sont pas comportés différemment d’Osmanagic en manipulant l’histoire. S’il y a d’autres intérêts politiques à l’oeuvre, il est clair qu’ils n’ont aucun désir de s’étendre sur la présence d’un établissement néolithique au sommet de la colline de Visocica, malgré les trouvailles signalées par moi-même (sans même prendre en compte la Vénus paléolithique, qui n’a pas été trouvée par moi). Il n’y a donc plus aucune possibilité de faire des recherches sur l’édifice sacré présent à l’intérieur du secteur.]

Irna : I think that the Bosnian archaeologists are well aware of the presence of older remains on Visocica ; in the « Arheoloski Leksikon Bosne i Hercegovine », published in 1988, you can find page 27 of the third tome some informations about Visocica : it’s presented as « prehistoric fortified place, Roman fort and medieval fortress » ; they mention a settlement of the Bronze Age attested by ceramics, and Roman bricks. But the hill is protected as National Monument, so that there is no urgency to excavate there. There are so many sites threatened by urbanisation which need urgent salvage excavations...

[Irna : Je pense que les archéologues bosniens sont parfaitement au courant de la présence de restes plus anciens sur Visocica ; dans "Arheoloski Leksikon Bosne i Hercegovine", publié en 1988, on trouve page 27 du tome III quelques informations sur Visocica : la colline est présentée comme "place fortifiée préhistorique, fort romain et forteresse médiévale" ; on mentionne aussi un établissement de l’Age du Bronze attesté par des céramiques, et des briques romaines. Mais la colline est protégée comme Monument National, ce qui fait qu’il n’y a aucune urgence à procéder à des fouilles. Il y a tellement de sites menacés par l’urbanisation qui nécessiteraient des fouilles de sauvetage en urgence...]

Pablito : Ed è per questo che nel mio paper sull’archeoacustica pubblicato di recente (http://www.sbresearchgroup.eu/Immagini/Archaeoacoustics_in_ancient_sites.pdf) che comprende anche, ma non solo, la collina di Visoćica dico : “There is an ongoing debate that the Old Town on the top had or was also a monastery, but all historians agree it was the location where many important historic documents of medieval Bosnia were written and signed. So it was a place where wisdom, culture and attention was common, helped by this good natural enviroment.”

[Pablito : Et c’est pourquoi, dans mon papier sur l’archéoacoustique récemment publié (http://www.sbresearchgroup.eu/Immagini/Archaeoacoustics_in_ancient_sites.pdf) qui évoque aussi, mais pas seulement, la colline de Visocica, je dis : "Il y a un débat en cours sur la présence ou non dans la vieille ville, au sommet de la colline, d’un monastère, mais tous les historiens s’accordent sur le fait que c’est en ce lieu que furent écrits et signés d’importants documents historiques de la Bosnie médiévale. C’était donc un lieu où raison, culture et attention étaient présentes, aidées par ce bon environnement naturel."]

Irna : I have to respectfully disagree with your statement that « there is an ongoing debate » about the presence of a monastery on top of the hill. As far as I know no historian ever mentioned this possibility. The most recent paper I read about this is « Franjevačka crkva i samostan sv. Nikole u srednjovjekovnim Milima » by Dejan Zadro in 2004, where he presents the state of the researches that have been made till 2004 about the Visoko valley and the location of the churches and monasteries. Absolutely no one, amongst the authors he studied, ever mentioned that. The first time I ever heard of that idea was from you, and as you cannot or will not give your source, I think that we can agree that there is no real debate.

[Irna : Avec tout le respect que je vous dois, je ne peux être d’accord avec votre affirmation d’un "débat en cours" sur la présence d’un monastère au sommet de la colline. Autant que je sache, aucun historien n’a jamais mentionné cette possibilité. Le texte le plus récent que j’ai lu à ce sujet est "Franjevacka cerkva i samostan sv. Nikole u srednovjekovnim Milima" par Dejan Zadro, 2004, où l’auteur présente l’état de la recherche jusqu’en 2004 sur la vallée de Visoko et l’emplacement des églises et monastères dans cette vallée. Absolument personne, parmi les auteurs qu’il cite, n’a jamais mentionné ce "débat". La première fois que j’ai vu cette idée c’est sous votre plume, et comme vous ne pouvez ou ne voulez pas donner vos sources, je pense qu’on peut conclure qu’il n’y a pas vraiment débat.]

Pablito : Quindi non dichiaro perentoriamente che in cima alla collina c’era un centro spirituale, ma pongo il sospetto. Ciò spiega perché sono andato a cercarci quelle caratteristiche di archeoacustica ambientale che ho trovato in altre sedi, dove un insediamento cristiano era stato costruito sopra una zona sacra molto più antica. Punto.

A questo punto credo di averti risposto Leda, ossia che possiamo ammettere l’archeologicità della cima della collina di Visoćica che sicuramente è stata più volte rimodellata anche in tempi molto antichi (castelliere).

[Pablito : Donc je n’affirme pas catégoriquement qu’il y avait un centre spirituel au sommet de la colline, mais j’en pointe la possibilité. Ce qui explique pourquoi je suis allé à la recherche des caractéristiques d’un environnement archéoacoustique tel que j’en ai trouvé dans d’autres lieux, où un établissement chrétien avait été construit par dessus une zone sacrée beaucoup plus ancienne. Point.

Je pense ainsi avoir répondu à Leda, c’est-à-dire que nous pouvons admettre que le sommet de la colline de Visocica est bien un site archéologique qui a sûrement été plusieurs fois remodelé dans des temps très anciens (forteresse).]

Irna : Well, if by « a hill remodelled by man in the shape of a pyramid » you meant only the local defensive arrangements that took place for the necessities of the fortification, I think we can – finally ! - agree on this !

[Irna : Eh bien, si par "une colline remodelée par l’homme en forme de pyramide" vous vouliez parler uniquement des aménagements défensifs entraînés par les nécessités de la fortification, je pense qu’on peut enfin considérer que nous sommes d’accord !

Pablito : Certo rimane la bocca amara di aver dovuto abbandonare la Bosnia senza aver risolto nessun mistero, bloccato da una parte da Osmanagić nello scavo della struttura che avevamo trovato con il georadar, sia bloccati dalle istituzioni bosniache nella nostra ricerca antropologica-archeologica sugli stekać (sic) e sugli antichi insediamenti nella Valle di Visoko, ma non è più un problema mio, ma casomai della Bosnia.

[Pablito : Il me reste certes de l’amertume d’avoir dû abandonner la Bosnie sans avoir résolu aucun mystère, arrêté d’un côté par Osmanagic pour la fouille de la structure que nous avons découverte au géoradar, et bloqué de l’autre côté par les institutions bosniennes dans notre recherche antropologico-archéologique sur les stekac (sic !) et sur les établissements antiques de la vallée de Visoko, mais ce n’est plus mon problème, c’est celui de la Bosnie.]

Irna : It seems that one of your fellow countrymen, the young Riccardo Brett, former archaeologist of the Foundation, had better luck with the valley of Visoko and the Bosnian institutions : http://archaetypes.jimdo.com/projects/the-valley-of-visoko/ ; he is planning, in collaboration with several Bosnian and European institutions, a summer campaign of excavations and archaeological survey in the valley. With a bit of luck – and a lot of work – he may be able to shed some light in a few months on the question we just discussed of the medieval settlement of the valley.

[Irna : Il semble pourtant qu’un de vos compatriotes, le jeune Riccardo Brett, ancien archéologue de la Fondation, a eu plus de chance que vous avec la vallée de Visoko et les institutions bosniennes : http://archaetypes.jimdo.com/projects/the-valley-of-visoko/ ; il prépare, en collaboration avec plusieurs institutions bosniennes et européennes, une campagne estivale de fouilles et de repérage archéologique dans la vallée. Avec un peu de chance - et beaucoup de travail - il pourra peut-être dans quelques mois apporter un nouvel éclairage sur cette question, que nous venons de discuter, des établissements médiévaux de la vallée.]

Curieusement, ce message a été effacé du forum Ostraka, de même qu’un autre message où je signalais, sans commentaire, la publication du papier d’Andrew Lawler sur l’état de l’archéologie en Bosnie. Il semble que le professeur Debertolis se soit plaint de mes critiques, il m’a été reproché (it) par les modérateurs de l’avoir traité de "charlatan" et "imposteur", ou d’entretenir une "polémique personnelle". Comme tout un chacun peut le vérifier, je n’ai jamais utilisé ces mots de "charlatan" ou "imposteur" à son propos, ni sur Ostraka, ni ici, ni sur aucun autre forum ; quant à la polémique, certes elle existe et je n’ai sans doute pas été tendre avec le professeur, mais elle n’a rien de "personnel" : depuis quand considère-t-on comme une attaque personnelle le fait de demander les sources, les arguments, les preuves, d’affirmations qui se veulent scientifiques ? Il semble, comme je le soulignais dans mon dernier post (en) sur le forum Ostraka où j’ai décidé de ne plus intervenir, que la "modération" de ce forum soit quelque peu à géométrie variable. Demander une source à "Pablito" ou corriger ses citations déformées est une attaque personnelle ; par contre celui-ci peut se permettre de m’accuser (it) d’être "una famosa ex personalità politica di una certa comunità etnica di Bosnia che a suo tempo ha avuto la peggio e che per tale motivo ha dovuto abbandonare Sarajevo per poi rifugiarsi in Francia" ("une fameuse ex-personalité politique d’une certaine communauté ethnique de Bosnie qui en son temps a subi la défaite et pour cette raison a dû abandonner Sarajevo et se réfugier en France" : autant dire d’être une criminelle de guerre serbe...), ou d’accuser (it) les archéologues bosniens de faux caractérisé, sans encourir la moindre remarque des modérateurs. Je ne sais pas si c’est son statut de professeur d’université qui tétanise ces modérateurs ; mais le fait d’être un universitaire sans doute respecté dans son domaine de compétence ne devrait pas le mettre à l’abri des critiques et questions lorsqu’il s’aventure, comme il le fait depuis trois ans, en dehors de ce domaine, ni lorsqu’il prétend faire oeuvre scientifique tout en refusant de se plier aux règles fondamentales de la science.